Géoéconomie

Rétrospective 2013 : la crise touche les pays émergents

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L’année 2013 a tenu son lot de promesses et de déconvenues. Les Etats-Unis, le Japon et quelques pays occidentaux ont croqué à nouveau dans les délicieux fruits de la croissance tandis que les pays émergents, comme trop gavés par une décennie d’euphorie économique, en ont recraché les noyaux. Les taux de croissance ahurissants des dernières années paraissent bien loin : au Brésil, les 7,5% de 2010 sont bien loin des 2,3% de 2012. En Inde, au taux de 10% rencontré en 2010 s’est substitué un taux plus modeste de 3,8%. Même le paradis turc  s’inquiète avec 3% de croissance, contre 8,8% en 2011 ! Les pays émergents, hors Chine et pays exportateurs de pétrole, sont touchés par ce même phénomène. Quelles en sont les raisons ? Pourquoi la reprise américaine qui a stimulé cette année le commerce mondial n’a-t-elle pas arrangé les choses ? Probablement car ce ralentissement est bien plus qu’un contretemps cyclique : il révèle des difficultés structurelles spécifiques aux modèles des émergents.

La contraction du commerce mondial de 2009 a profondément modifié les stratégies de croissance des émergents. A la recherche d’un modèle économique stable pour assurer une stabilité politique et sociale, les dirigeants des BRICS optèrent pour le passage d’une économie exportatrice à une économie tirée par la demande. Les banques centrales se lancèrent dans une politique monétaire expansionniste en baissant drastiquement les taux d’intérêt pour favoriser l’utilisation du crédit. La demande augmenta mais l’offre ne put suivre le rythme en raison de problèmes structurels internes : manque d’infrastructures, insuffisance de main d’œuvre qualifiée, … Rappelons que les manifestations estivales au Brésil et en Turquie furent déclenchées par des revendications concernant la vétusté des réseaux de transports et la destruction d’un parc ! Pour répondre à la demande en excès, les pays recoururent à un surplus d’importations : presque tous les pays émergents hors Chine aujourd’hui ont une balance courante négative !

Les déficits extérieurs importants, la dette abyssale et les fragilités structurelles internes ont inquiété les investisseurs qui attendaient le moindre signal positif du côté de Wall Street pour rapatrier leurs sommes investies au gré de la défiance générale suscitée par les atermoiements politiques et la médiocrité économique à Bruxelles et Washington. Ce signal fut l’annonce de relevée des taux de la Fed : les investisseurs fuient les émergents pour des placements plus sûrs. En découle une crise des taux de change (livre turque, la roupie indienne, le real brésilien ont plongé de plus de 10% durant l’été).

Le cercle vicieux est enclenché pour 2014 : la fuite des capitaux alourdit les difficultés de refinancement de la dette et la chute des taux de change renchérit les importations donc enfonce les déficits commerciaux. Si l’on ajoute à ces difficultés la forte dépendance de ces modèles aux cours des matières premières, la hausse des coûts salariaux qui réduit la compétitivité, et les tensions sociales dans ces pays, l’année 2014 s’annonce charnière. En somme les BRICS, c’est pas du béton.

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