L’Espagne des années 1980 : « la décennie du changement »
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L’Espagne des années 1970 : entre crise économique et transition politique
Malgré un début de transition politique plutôt calme, l’Espagne dut rapidement faire face à une dislocation de l’union nationale qui avait émané de la volonté commune des Espagnols à construire la démocratie. Ainsi, les partis non au pouvoir entrèrent dans une logique d’opposition engagée. Plus grave encore pour l’unité du pays, la Catalogne et le Pays Basque affirmèrent leur autonomie par référendum en 1980. Les attaques terroristes se multipliant, l’incertitude politique atteint son sommet au début des années 1980. Et alors qu’Adolfo Suarez démissionna en 1981, le roi Juan Carlos lui-même dut mettre fin à un coup d’Etat au mois de février. C’est finalement Leopoldo Calvo Sotelo qui devint Premier Ministre.
D’un point de vue économique, le rétablissement espagnol fut de courte durée, un nouveau choc pétrolier frappant le pays en 1979. L’inflation reprit de l’ampleur, alors que le chômage repartit à la hausse (plus de 15%) du fait d’une multiplication des faillites et des réductions d’effectif. Or, afin d’intégrer la Communauté Economique Européenne (CEE), l’Espagne devait se rapprocher des standards européens.
C’est dans ce contexte que Felipe Gonzalez, chef de file du Parti Socialiste et Ouvrier Espagnol (PSOE), forma le premier gouvernement socialiste (avec une forte majorité) suite aux élections de 1982, remportées largement par le PSOE devant l’Alliance Populaire (AP) de droite. Dévaluant la Peseta de 25%, le gouvernement relança les exportations, mais il ne réussit pas à réduire le déficit public. Pour autant, en 1986, l’inflation avait été réduite, la croissance était repartie et le déficit de la balance commerciale divisé par deux par rapport à 1982. Un gros point noir persistait : malgré la promesse du gouvernement de créer 800 000 emplois, le taux de chômage dépassait désormais les 20%, notamment à cause d’un marché du travail très peu flexible et d’une augmentation importante du nombre d’actifs dans les années 1980 (notamment les femmes, qui ne pouvaient que difficilement travailler sous Franco, ainsi que la génération du baby-boom). Globalement, les résultats furent encourageants, malgré une politique surprenante de la part d’un gouvernement socialiste.
Ainsi, l’Espagne put intégrer la CEE le 1er janvier 1986 : l’Espagne se rouvrit ainsi au monde après des décennies d’isolationnisme sous Franco. La CEE aida économiquement l’Espagne dans son développement via le FEDER en échange d’une baisse très importante des barrières tarifaires. L’Espagne connut alors un afflux importants d’investissements étrangers, lui permettant de se rapprocher des standards économiques européens.
En 1986, le PSOE gagne à nouveau les élections et Felipe Gonzalez fut reconduit au pouvoir. L’Espagne continua alors de développer ses infrastructures ainsi que son système de protection sociale, dans un contexte d’expansion économique notable (près de 5% de croissance annuelle entre 1986 et 1990). En 1989, l’Espagne rejoint le Système Monétaire Européen (SME), facilitant ainsi les échanges économiques avec l’Europe. Mais l’appréciation de la Peseta fut dure à encaisser pour la balance commerciale espagnole, qui se détériora de façon continue durant la deuxième moitié de la décennie. Par ailleurs, si le chômage baissa, il dépassait encore les 16% au changement de décennie.
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