Tiers-Monde et émergents

La Chine des seigneurs de la guerre (1911 – 1928)

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Yuan Shikai, anciennement grand défenseur de l'Empire des Qing et modernisateur de l'armée impériale, prend le pouvoir à sa chute, sans toutefois parvenir à le conserver. De nombreux seigneurs de la guerre se sont révélés être d'anciens officiers subalternes du général.
Yuan Shikai, anciennement grand défenseur de l’Empire des Qing et modernisateur de l’armée impériale, prend le pouvoir à sa chute, sans toutefois parvenir à le conserver. De nombreux seigneurs de la guerre se sont révélés être d’anciens officiers subalternes du général.

La chute définitive de l’empire des Qing, en 1911, ouvre la voie à une ère particulièrement sombre dans un XXe siècle chinois déjà bien trouble. C’est la période des seigneurs de la guerre, des chefs d’armées privées qui mettent le pays en coupe réglée et le pillent allègrement pendant plus de 25 ans.

L’ère de la violence

Pendant plus d’un quart de siècle, des dizaines de seigneurs de la guerre s’affrontent, des régions entières changeant de mains du jour au lendemain au gré du hasard des armes. On assiste à 130 guerres entre plus de 1300 de ces seigneurs entre 1911 et 1928. La Chine devient une immense « zone grise » et se militarise dans des proportions terrifiantes : on compte moins de 500 000 soldats en 1916 contre plus de 2 millions en 1928. Le pays, privé de toute capacité de réaction, perd plusieurs provinces de taille : le Xinjiang se détache, le Tibet acquiert son indépendance et la Mongolie devient un semi protectorat soviétique.

Un modèle économique prédateur

Le phénomène des seigneurs de la guerre repose sur un schéma économique somme toute assez simple. Les armées sont essentiellement composées de paysans pauvres (qui, en cas de défaite, sombrent dans le banditisme et le brigandage). Pour entretenir son armée, un général va s’appuyer sur trois types de revenus distincts.

Tout d’abord, il surtaxe les populations et détruit l’appareil productif agricole par ses actions prédatrices. La militarisation, en désorganisant les transports, empêche l’acheminement de nourriture vers les régions les plus sinistrés. Ainsi, plus de deux millions de paysans vont mourir de faim en 1928, alors que Tchang Kaï Chek est aux prises avec les seigneurs du Nord.

Ensuite, il va encourager la très lucrative culture du pavot ainsi que le trafique d’opium.

Enfin, on assiste à une course à la prise de Pékin par les seigneurs de la guerre : en effet, celui qui détient la capitale est automatiquement reconnu comme dirigeant légitime de la Chine par la communauté internationale, et peut ainsi s’approprier la manne des droits de douane. Ainsi, les seigneurs de la guerre créent ou tout au moins catalysent les trois plus grands fléaux de la Chine du début du XXe siècle : banditisme, opium et famine.

L’influence étrangère

Le pillage du pays est assez clairement encouragé par les puissances étrangères qui, attirées par l’immense marché qu’est déjà la Chine, ne veulent surtout pas que le pays se modernise et accède au rang de puissance régionale. Ainsi, afin de sécuriser leurs différentes « zones d’influences » dans l’empire du milieu, ces puissances vont se choisir des « poulains » parmi les plus puissants généraux : Feng Yuxiang pour l’URSS, Wu Peifu pour le Royaume Uni ou Zhang Zuolin pour le Japon.

La fin des seigneurs de la guerre

La période des seigneurs de la guerre prend progressivement fin à partir de 1927-1928 et la montée en puissance de Tchang Kaï Chek et de son Guomindang. Il reste que cette ère a réouvert une plaie dans la conscience collective chinoise : la division de la Chine. Le Guomindang et la Parti communiste utiliseront tour à tour ce sentiment très ancien (voir le roman des Trois Royaumes, écrit au IIIe siècle) pour asseoir leur pouvoir sur le thème de la réunification naturelle et du retour à l’ordre.

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