La crise des fusées de Cuba (1962) ou le paroxysme de l’affrontement Est-Ouest
L’histoire est souvent pleine de symboles qui peuvent réduire, à eux seuls, plusieurs années ou décennies de combats, qu’ils soient idéologiques ou militaires. La crise des fusées en est définitivement un. Fidel Castro arrive au pouvoir à Cuba en 1959, au grand dam des Etats-Unis, qui échouent (parfois lamentablement) à le destituer. Castro doit se résoudre à rechercher l’aide de l’URSS et de Nikita Khrouchtchev, qui, dès juillet 1962, promet la fourniture de plusieurs missiles à la petite île caribéenne.
Cependant, c’est à partir d’octobre que la situation se tend irrémédiablement. Le 14 octobre, on annonce à Kennedy qu’un U-2 américain a repéré près de La Havane ce qui ressemble à une rampe de lancement de missiles. C’est le plus fort symbole de l’affrontement Est-Ouest : des Etats-Unis officiellement vulnérables (même s’ils l’étaient déjà, grâce aux missiles soviétiques à longue portée), à 150 kilomètres des côtes de Floride. Six jours plus tard, un blocus naval (décidé à l’époque sous le nom de « quarantaine défensive ») est décidé, afin de ramener Cuba à la raison, et surtout d’empêcher toute nouvelle arrivée de bateaux soviétiques. Le 26 octobre, Khrouchtchev recule et propose un compromis : les Etats-Unis doivent promettre de ne pas envahir Cuba en échange d’un retrait des fusées soviétiques du pays. Cela n’empêchera pas Cuba d’abattre un avion américain peu après. La mise en quarantaine se termine au cours du mois de novembre, les Etats-Unis s’étant assurés que Cuba ne représentait plus une menace par ses missiles.
Cette crise (très courte, mais très intense) a pu poser un certain nombre de questions. Qu’aurait fait Staline, perçu comme plus dur que Khrouchtchev, s’il avait dû aider Castro ? Cette crise ne marque-t-elle pas le véritable tournant de la Guerre Froide, montrant que les Soviétiques n’étaient pas prêts à aller jusqu’au bout (c’est-à-dire jusqu’à l’affrontement militaire) face aux Etats-Unis ? Quoi qu’il en soit, c’est à partir de novembre 1962 que la Détente s’est véritablement opérée entre les Deux Grands. Cela passe, bien évidemment, par la création du téléphone rouge, en 1963, reliant directement Moscou à Washington. Pendant ce temps, Cuba a toujours cherché à contourner l’embargo américain (qui persiste encore aujourd’hui, bientôt cinquante ans après la crise), décidé par Kennedy quelques temps avant cette fameuse crise, et a alors rejoint le Pacte de Varsovie une dizaine d’années plus tard.