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La crise du trafic aérien : vers un modèle plus raisonné ?

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En 2019, 10 millions de voyageurs empruntaient quotidiennement les 26 000 avions de lignes des 1400 compagnies aériennes en service à travers le monde. Les décollages se succédaient à la fréquence des battements du cœur humain. Aujourd’hui, la crise de la COVID-19 touche durement le trafic aérien. En 2020, le secteur aérien enregistrera des pertes records de plus de 100 milliards de dollars. Les compagnies aériennes, déjà traditionnellement sensibles aux conjonctures, vont-t-elles devoir envisager une réorganisation drastique de leur modèle ? Comment l’épidémie mondiale peut-elle faire évoluer durablement le secteur ?

Le fret aérien, vers un rééquilibrage des activités :

Photo de l'aéroport de Téruel (Espagne). Il n'accueille pas de trafic aérien mais assure uniquement la maintenance d'une centaine d'avions en stationnement ou en cours de recyclage.
L’Aéroport de Téruel n’accueille pas de trafic aérien mais une centaine d’avions en maintenance ou en phase de recyclage.

En matière de transport de marchandises, l’aviation représente à elle seule un tiers de la valeur des produits échangés. Le fret ne représente pourtant qu’une part minoritaire des activités des compagnies et environ 12% de leurs recettes. Malgré le ralentissement du commerce international, le fret aérien est moins affecté par la crise que le transport de voyageurs. On observe aujourd’hui une hausse de cette activité au détriment du transport de passagers.

En effet, déjà largement sollicités pour le transport de matériels pharmaceutiques et de substances tels que les vaccins et agents chimio-thérapeutiques, les avions et leurs conteneurs réfrigérés se révèlent parfaitement adaptés au transport des tests de détection du virus, nécessitant une température constante de 5°C. Aussi, les compagnies n’ont pas hésité à remettre en service des avions tout cargo et à retirer des rangées de sièges passagers pour y mettre des équipements médicaux. À l’heure actuelle, les acteurs du secteur réfléchissent à la distribution d’un potentiel vaccin à travers le monde.

Diminution des voyageurs, une tendance sur le long terme

La baisse du nombre de voyageurs explique également ce rééquilibrage d’activités. La disparition des voyages d’affaires, qui représentaient jusqu’à 80% des marges des compagnies aériennes, pourrait perdurer. En effet, outre l’annulation d’événements internationaux, de nombreuses entreprises ont revu la mobilité de leurs salariés à la baisse. Le groupe l’ORÉAL a par exemple annoncé qu’il souhaiter diminuer durablement de 30 à 40% les déplacements de ses associés au profit de réunions virtuelles. Les professionnels sont désormais plus sélectifs car les déplacements, déjà synonyme de coûts importants, pourront à l’avenir être encore plus contraignants du fait des risques épidémiques (documents supplémentaires à présenter, attentes plus longues dans les aéroports…).

Ensuite, si les préoccupations environnementales telle que la tendance au « flygskam* » ou « honte de voler » laissaient présager une baisse progressive des voyages pour raison personnelle, la crise de la COVID-19 a fait brutalement chuter leur nombre de 99% pendant plusieurs mois. De ce fait, la crise sanitaire a des répercussions sur l’environnement. La situation sanitaire a accéléré la nécessité de changement et incite les compagnies à revoir dès à présent leur modèle. Par exemple,  le stationnement dans un aéroport tel que Munich coûte environ 2000 euros par jour. Pour limiter ce coût, elles ont préféré abandonner certains modèles d’avion anciens, qui se révèlent être aussi les plus polluants, en les envoyant dans des aéroports cimetières tel que celui de Téruel en Espagne.

Face aux 2 heures de travail que nécessite la désinfection d’un Boeing A320, l’utilisation de petits modèles récents permet de plus une meilleure adaptation du service compte tenu du nombre restreint de passagers. Enfin, l’impact environnemental des trajets semble aussi pouvoir être réduit. Certains gouvernements souhaitent conditionner leurs aides financières par la suppression des trajets effectués en moins de 2h30 par le train. En parallèle, les espaces aériens n’étant plus saturés, les nombreux détours souvent nécessaires entre deux destinations sont maintenant évitables.

Conclusion

Les compagnies aériennes prédisent un retour à la normale de leurs activités d’ici 2024. Pourtant, la crise de la COVID-19 peut être perçue comme le catalyseur d’un changement structurel et durable du trafic aérien. Les compagnies semblent s’engager plus rapidement en faveur de l’environnement avec l’instauration d’un modèle plus raisonné.

Les compagnies devront également faire face aux conséquences sociales désastreuses entraînées par la crise. Un emploi sur deux lié directement ou indirectement au secteur serait aujourd’hui menacé.

 

Note :

*flygskam ou « Honte de prendre l’avion » : terme suédois illustrant le malaise et la culpabilité des personnes sensibles aux enjeux environnementaux . Cette tendance prend de plus en plus d’ampleur. Selon une enquête de WWF publiée en mars 2020, un Suédois sur cinq aurait choisi au moins une fois de prendre le train au détriment de l’avion afin de limiter la pollution générée par son voyage.

Sources :

RFI, Défis et menaces du secteur aérien, 18 Septembre 2020.

Arte Regards, Avions cloués au sol, émission du 14 septembre 2020.

Arte, XENIUS – COVID 19 : les nouveaux défis du trafic aérien, émission du 11 août 2020.

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Juliette ALLANIC

Ancienne étudiante en prépa ECS, Juliette est actuellement en M2 d'école de commerce. Elle est passionnée par l'actualité et plus particulièrement par les enjeux sociaux et environnementaux dans la géopolitique actuelle.

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