Pays industrialisés

Que peut-on apprendre des Trente Glorieuses ?

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Affiche publicitaire de Moulinex

Les Trente Glorieuses (1945-1973) sont perçues dans l’imaginaire collectif comme une période rêvée où la croissance était forte, et le chômage faible. La construction d’un État Providence en demeure le principal héritage. Depuis lors, le système de protection sociale prend en charge : la maladie, la vieillesse (les retraites), les accidents du travail ainsi que la famille (CAF…), et permet ainsi de couvrir les Français face aux différents risques de la vie. La valorisation du travail est également un lègue de la période et a contribué à l’image méritocratique que la société française entend se donner. Quelle expérience tirer de ces deux avancées?

graphique prélèvement obligatoires 1870 2010
Les prélèvements obligatoires dans les pays riches, 1870-2010

A la suite du rapport Beveridge, le Conseil National de la Résistance inscrivit en 1944 la création de la Sécurité Sociale dans son programme politique qu’il réalisa en 1945. La protection sociale représente une dépense importante qui va croître tout au long du XX siècle. Son financement, assuré par les cotisations sociales (prélèvements sur les salaires), est donc un enjeu majeur. L’essor spectaculaire des prélèvements obligatoires (impôts et cotisations) par rapport au revenu (voir graphique), illustre le poids croissant des dépenses de la Sécurité Sociale. Aujourd’hui les cotisations sont parfois montrées du doigt car elles alourdiraient le coût du travail et donc affecteraient la compétitivité des entreprises françaises face à la concurrence européenne. Néanmoins il ne faut pas oublier l’objectif des cotisations : financer le système social auquel les Français sont, à juste titre, si attachés.

Créer un système de protection sociale européen permettrait à la fois de mettre fin à une concurrence par le moins disant social via une fiscalité basse, tout en permettant une meilleure protection des salariés des pays aujourd’hui les plus touchés par la crise. Cette solidarité contribuerait à rapprocher l’Europe des peuples, créerait des stabilisateurs automatiques utiles en période de crise, et participerait donc à la cohésion de la zone euro.

héritage vs salaire graphique
Travailler ou hériter, quel est le meilleur moyen de s’enrichir ? Tel est le dilemme de Rastignac

La société des Trente Glorieuses a bâti un système de protection sociale grâce à une ponction non négligeable sur les revenus du travail. Le travail était donc, et le reste encore, une valeur centrale dans la société française, d’autant plus qu’à l’époque les 1% des salariés les plus riches avait un niveau de vie supérieur aux revenus générés par les 1% des héritages les plus élevés (voir graphique). Le travail permettait ainsi d’accéder tout en haut de l’échelle sociale, ce qui constitue une véritable révolution puisque durant tout le XIX siècle la seule voie d’accès au sommet de la pyramide des revenus était l’héritage. Cette chute de l’héritage va de pair avec celle du capital qui a fondu lors des deux guerres mondiales. Gardons-nous bien de baisser les impôts sur les successions et sur le capital (ISF etc.) si l’on veut préserver une société française la plus méritocratique possible. Là encore, à ceux qui mettraient en avant la mobilité des fortunes qui jouent de la concurrence fiscale, la réponse européenne est pertinente puisque un impôt européen sur les successions et sur le patrimoine garantirait l’égalité entre héritiers et non-héritiers.

Sachons donc préserver notre modèle social, et la valorisation du travail, lègues précieux des Trente Glorieuses.

Pour aller plus loin : Le capital au XXI siècle de Thomas Piketty.

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