Les relations latino-étatsuniennes au début du XXe siècle
Au cours du XIXe siècle, les Etats-Unis ont peu à peu placé leurs pions sur le reste du continent, notamment via la doctrine Monroe (1823), affirmant que l’Amérique devait être « américaine », loin de toute intervention européenne. Avec le développement de la puissance américaine, cette doctrine se concrétise à travers une guerre directe en 1898 à Cuba, alors sous domination espagnole. Les Etats-Unis remportent rapidement le conflit, ouvrant plus d’un demi-siècle de domination américaine sur l’île. Parallèlement, l’Espagne cède d’autres territoires, rapidement récupérés par les Etats-Unis, comme Porto Rico.
La toute fin du XIXe siècle a donc officiellement marqué la transition d’une colonisation européenne du continent à une hégémonie états-unienne. Au tout début du siècle suivant, cette transition est entérinée durant les mandats de T. Roosevelt, qui lança sa « politique du bâton ». Par cette politique, les Etats-Unis s’arrogent le droit d’intervenir dans tout pays du continent en cas de mauvais gouvernement. Les Etats-Unis n’auront mis que quelques années à se considérer comme supérieurs au reste du continent, alors que justement la guerre de 1898 et ses conséquences affirmaient la réelle solidarité de tous les pays du continent.
La finalisation du canal de Panama, après le retentissant échec français, finit d’assouvir la présence américaine avant la première Guerre Mondiale. En soutenant les velléités indépendantistes en Colombie, originellement opposée au canal, ils obtiennent la création du Panama en 1903, qui confère aux Etats-Unis le contrôle dudit canal (jusqu’en 2000). Plus au Nord, les Etats-Unis maintiennent leur contrôle dans toutes les Caraïbes, au prix d‘interventions militaires (Mexique, Nicaragua) ou en plaçant des dirigeants qui leur sont favorables (Cuba). Cette vague américaine sur le continent commence néanmoins à être contestée, bien évidemment dans les pays latino-américains (vague anti-gringos au Mexique notamment) mais également aux Etats-Unis, où l’anti-impérialisme est un courant fort.
L’implantation américaine ne se borne pas à la seule politique. Les Etats-Unis veulent également faire fructifier leur présence d’un point de vue économique et commercial. Une fois bon nombre de régions et de pays sous influence, voire conquis, il s’est agi d’y investir, massivement, ainsi que leur faire accepter le dollar comme première ou seconde monnaie (Amérique Centrale principalement). La majeure partie des investissements américains à l’étranger se tourne vers les matières premières (minérales, agricoles, minières), plus particulièrement à Cuba (canne à sucre), au Costa Rica (plantations), au Pérou et Chili (mines). Cela permet aux Etats-Unis de devenir en moins de quatre décennies le 3e investisseur mondial à l’étranger, en 1914, loin derrière le Royaume-Uni, mais juste derrière la France. C’est le début d’un renversement économique et financier historique : avec le début de la guerre, les Etats-Unis ont, pour la première fois de leur histoire, un solde d’investissement à l’étranger positif (plus de capitaux américains investis à l’étranger que de capitaux étrangers investis aux Etats-Unis). La part de la région latino-américaine y est prépondérante, puisque diverses estimations montrent que près de la moitié des investissements américains étaient destinés aux pays latino-américains (deux tiers si l’on y inclut les investissements destinés au Canada).