Qu’est ce que les remises migratoires ?
En 2012, la Banque Mondiale a estimé que les transferts de fonds de migrants vers leur pays d’origine, les “remises migratoires” représentaient plus de 500 milliards de dollars, dont 400 milliards vers les pays en développement. Alors que ces flux financiers ne représentaient que 3 milliards de dollars dans les années 1970, ils constituent aujourd’hui une ressource majeure pour les populations des pays en développement. Si l’analyse de l’impact économique de ces remises est souvent l’objet de débats, l’ensemble des chercheurs s’accordent sur l’impact de ces envois à l’échelle locale. Les remises représentent ainsi au Mali ou au Maroc des montants supérieurs à l’aide publique au développement (APD). Transfert de particuliers à particuliers de façon formelle (banques ou sociétés de transfert d’argent), ou informelle via des porteurs de confiance, ils ont vite été considérés comme des leviers de développement local aussi, voire plus, efficaces que l’APD du fait de la relation directe avec le bénéficiaire. Principalement considérées sous l’angle monétaire, le terme « remises migratoires » peut aussi englober les remises « immatérielles » acquises dans le pays d’accueil valorisées en cas de retour. Néanmoins, parler de « remises migratoires » revient dans la majorité des cas à s’intéresser aux transferts financiers. Les remises de fonds servent par exemple, en plus de financer la consommation courante des ménages, à investir dans l’immobilier ou financer des micro-activités économiques. Les transferts formels représentent ainsi la 2ème source de financement externe des pays en développement derrière les investissements directs à l’étranger et devant l’APD. En France, les flux s’élèveraient à près de 9 milliards d’euros, soit l’équivalent de l’APD annuelle.
Vers un passage de l’aide publique à l’aide privée au développement ?
Au regard du niveau élevé de ces flux financiers et de leur potentiel, de nombreux pays ont tenté de les endogénéiser ou du moins de les intégrer dans la réflexion sur le co-développement. Les remises de fonds pourraient ainsi constituer une forme de financement innovant du développement. A cet égard des nouvelles formes d’épargne ont été créées en France (le livret d’épargne co-développement en 2007 par exemple) ainsi que des actions autour de l’accueil de ressources liées aux remises de fonds au Mexique notamment (Programme 3×1 complétant l’apport des migrants par des investissements, lancé en 2002). Aussi, lors du sommet du G8 à l’Aquila en 2009 les chefs d’Etat et de gouvernement se sont mis d’accord sur une réduction de 5% du coût des transactions d’ici à 2014. Selon une étude récente de l’Overseas Development Institute, le manque à gagner pour le continent africain serait supérieur à 1 milliard de dollars en frais de transaction. Ces diverses mesures et politiques serviraient ainsi à la fois les pays d’accueil en réduisant leur APD et de départ par un moindre investissement interne.
Les remises de fonds ne sont cependant pas exemptes de défauts. Elles peuvent constituer une rente et ainsi entrainer les ménages, voire des économies, dans des situations plus critiques que celles de départ si elles ne sont pas utilisées à des fins productives. Elles sont de plus affectées par la conjoncture économique et dépendante d’un certain type de relation entre les migrants et les non-migrants, ainsi qu’à l’activité économique des premiers. L’arrivée à l’âge de la retraite des membres d’une vague migratoire peut ainsi avoir un effet négatif. Réel apport, favorisé par la mondialisation économique et financière constituant un élément de développement économique local à même de susciter des dynamiques vertueuses, elles demeurent complémentaires des actions publiques internes et externes.