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Yémen, état des lieux d’un conflit

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Porté par les grandes puissances régionales du Moyen-Orient, l’antagonisme chiite/sunnite déchire le Yémen. Aux  bombes de l’alliance saoudienne répondent les exactions des Houthis, sans que l’on ne puisse espérer une issue à ce conflit. Le blocus sanitaire imposé jusqu’à peu a laissé le pays exsangue, incapable d’éradiquer l’épidémie de choléra qui s’est développée. Le jeu des alliances, instables et précaires, empêche toute politique de lutte contre la famine qui menace. Peu avant son assassinat en décembre 2017, le retournement spectaculaire de l’ex-président Saleh, soutien historique des Houthis mais souhaitant, par ce geste, la fin du blocus de la coalition, marque un ultime rebondissement dans ce conflit qui dure depuis 2012.

La guerre au Yemen, un conflit tribal régionalisé.
Yemen, état des lieux d’un conflit. Décembre 2017

Un positionnement stratégique

Bab-el-Mandeb. La Mer Rouge s’y jette dans l’Océan Indien et 3,8 millions barils de pétrole y transitent chaque jour. Sur la côte est de ce détroit, se joue une guerre oubliée de l’Occident. La famine et le choléra, les bombardements et les attentats déchirent le sud de la péninsule arabique. Les alliances s’y font et se défont, au rythme du soutien apporté par les grandes puissances régionales. En effet, ce jeu de dupe, cette « guerre stupide » pour reprendre les mots d’Antonio Guterres, secrétaire général de l’ONU, n’est devenue qu’une articulation du conflit entre l’Iran et l’Arabie Saoudite, dont une clé de lecture est la lutte entre chiites et sunnites. Et les morts y sont nombreux, victimes tant de la famine que des bombardements de la coalition saoudienne, des exactions houthistes ou des attentats de l’Etat Islamique. L’accès à la mer est primordial et participe de cette guerre. Les tentatives de résolution de ce conflit ont en effet en partie achoppé sur le refus des Houthis chiites dont la région attribuée (Saana et Sadaa) était exclue de la zone littorale.

Des frontières mouvantes

Si les alliances y sont mouvantes, les frontières le sont tout autant. Le conflit est en effet d’abord ethnique et tribal. Jusqu’en 1990, le Yémen était divisé en deux états indépendants : au nord, la République arabe du Yémen, au sud, la République démocratique populaire du Yémen. Il fallut attendre la fin de la guerre entre le sud marxiste et le nord de Ali Saleh pour qu’ils se réunifient. Enfin, les négociations menées en 2000 avec l’Arabie saoudite dessinèrent le visage fragile du Yémen d’aujourd’hui.

Un pays fracturé par des zones de tension

Cependant, l’ancien royaume de Saba reste fracturé par un violent antagonisme entre les populations du sud, à majorité sunnite et celle du nord dont l’allégeance va à l’Iran chiite. Profitant de la quasi faillite du pays, AQPA (Al-Qaeda dans la Péninsule Arabique) se développe à partir de 2009 dans les régions désertiques du centre du Yémen (autour des villes de Hayoun, Al-Baida et Shaba). La prise de la capitale Sanaa par les Houthis en 2014 marque le véritable début du conflit qui ensanglante aujourd’hui le Yémen. L’Arabie saoudite, à la tête d’une large coalition de pays arabes, soutenue par les USA, oppose une réponse ferme aux velléités d’expansions houthistes. Elle prend la forme de l’opération « Tempête de fermeté » , lancée le 25 mars 2015. Malgré tout, les raids aériens saoudiens et égyptiens laissent Sanaa en ruine sans pour autant stopper l’avancée des Houthis. L’irruption de l’Etat islamique dans le conflit accompagne alors le déploiement massif de troupes saoudiennes à la frontière du Yémen.

Entraîné dans un conflit régionalisé

Les enjeux de la guerre au Yemen dépassent les simples frontières du pays. L’Iran et l’Arabie saoudite luttent aujourd’hui pour n’y rien céder en influence. Le conflit se généralise, notamment lors de l’arrivée de la coalition saoudienne. Le dernier rapport de « Conflict Armament Research », sur l’approvisionnement en armes du conflit yéménite dévoile un jeu d’alliances complexes. La Russie, en observateur attentif, s’attelle à renforcer l’axe Moscou-Téhéran, tandis que Washington soutien Riyad dans sa lutte contre les rebelles chiites. Le conflit  se régionalise mais les victimes demeurent principalement les populations yéménites. Les ONG, suppléant en grande partie le rôle de l’état failli, rappellent qu’à ce jour le conflit a déjà fait plus de 10 000 morts civils auxquelles s’adjoignent 2000 victimes du choléra.

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