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La Tunisie face au djihadisme

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La Tunisie est le pays qui possède le plus de ses ressortissants aux côtés du groupe Etat Islamique
La Tunisie est le pays qui possède le plus de ses ressortissants aux côtés du groupe Etat Islamique

Cinq ans après la révolution de jasmin qui avait fait partir le dictateur tunisien Ben Ali, le pays a de nouveau été secoué par de violentes manifestations. Sans perspective d’avenir, de nombreux jeunes Tunisiens tombent dans le djihadisme.

Depuis le 16 janvier et le décès d’un jeune chômeur à Kasserine, ville délaissée du centre du pays, plusieurs villes tunisiennes ont été le théâtre de manifestations. Les principales villes concernées comme Kasserine ou Sidi Bouzid sont des villes de l’intérieur du pays qui ont été délaissées par les différents pouvoirs. Face à l’ampleur de la crise, le pouvoir en place a décrété la mise en place d’un couvre-feu. Bien que la Tunisie ait pu réaliser une transition démocratique depuis 2011, la transition économique postrévolutionnaire n’a en revanche pas été réussie. La croissance a été faible (moins de 1% en 2015) et 15% de la population est au chômage. La catégorie de population la plus touchée est les jeunes qui ont un taux de chômage de 30%. Il y a également une division entre les régions dans le pays puisque, d’un côté, le littoral et le nord sont développés grâce notamment au tourisme, et, d’un autre côté, l’intérieur et le sud du pays sont des régions marginalisées donc davantage touchés par le chômage. En 2015, la Tunisie a été touchée par 3 attentats revendiqués par l’organisation Etat Islamique ce qui a fait chuter le tourisme dans le pays alors que ce dernier représente près de 10% de son PIB. Au total, ces attentats ont tué 38 touristes et 13 membres des forces de l’ordre tunisiennes.

La Tunisie : premier pays « exportateur » de djihadiste

Selon une étude publiée en décembre dernier, sur les 27 à 30 000 combattants étrangers que compterait le groupe Etat Islamique, 6000 seraient d’origine tunisienne, ce qui fait de la Tunisie le pays qui possède le plus de ressortissants en Syrie et en Irak aux côtés du groupe djihadiste. Le phénomène n’est pourtant pas nouveau puisque auparavant déjà des Tunisiens faisant partis des djihadistes en Afghanistan, en Bosnie ou en Irak au début des années 2000 mais pas dans des proportions aussi élevées. Les jeunes Tunisiens qui, du fait de la crise économique dans leur pays vivent dans des situations précaires, se tournent de plus en plus vers le choix de l’émigration ou vers la radicalisation religieuse. Les principales causes de la propagation du djihadisme en Tunisie sont à la fois historiques et contemporaines. En effet, la percée des islamistes aux élections en 1989 avait obligé Ben Ali à resserrer l’étau autour des religieux notamment en emprisonnant ou en forçant à l’exil des milliers d’islamistes. De fait, à partir du milieu des années 1990 face à la mainmise du dictateur sur les affaires religieuses, beaucoup se sont tournés vers les réseaux sociaux et les chaînes de télévision satellitaires religieuses étrangères diffusant une pensée wahhabite. Ensuite, la révolution de 2011 en Tunisie a créé un vide dans lequel les groupes religieux radicaux se sont engouffrés. La crise économique et sociale qui a suivi a permis aux djihadistes de recruter dans les milieux défavorisés, comme dans les villes de l’intérieur du pays. La perspective d’un avenir meilleur et surtout d’un but concret séduit ces jeunes qui partent faire le « djihad » aux côtés de l’organisation Etat Islamique. De plus, la frontière commune de plus de 500 kms entre la Tunisie et la Libye est un élément s’ajoutant au problème djihadiste en Tunisie puisqu’en étant poreuse elle permet des échanges avec certains groupes djihadistes installés dans le chaos libyen. Ainsi, l’ensemble de ces facteurs font que l’influence de la propagande djihadiste en Tunisie est forte et que, si la Tunisie veut les résoudre, elle devra s’occuper des populations et des zones délaissées de son territoire.

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