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Les Mamelouks, des esclaves au pouvoir

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La valse des empires musulmans (6/8). En 1250, une armée d’esclaves soldats à la solde des Ayubbides prend le pouvoir au Caire. Ce sont les Mamelouks. Ils ramènent le calme dans un Moyen-Orient miné par les croisades, les invasions mongoles et la peste noire. Ils restent au pouvoir jusqu’à leur défaite face à l’Empire ottoman en 1517.

Les Mamelouks, une origine ancienne qui remonte aux califes abbassides.
Étendue de l’influence des Mamelouks (wikimedia).

 

Au milieu du XIIIe siècle, la dynastie des Ayubbides crée par Saladin un siècle plus tôt, est en grand danger face aux croisades menées par le roi Saint-Louis. Ce dernier est néanmoins fait prisonnier par les soldats esclaves des Ayyubides, les Mamelouks. Sortis renforcés de cette victoire, ils profitent de la mort du dernier sultan ayyubide d’Égypte pour assassiner son successeur et prendre sa place.

Les Mongols, une aide paradoxale

La prise de pouvoir des Mamelouks s’explique aussi par une autre menace, bien plus dangereuse que celle des croisés : les invasions mongoles. Effrayés par l’avancée mongole, les Ayyubides achètent des esclaves-soldats en masse sur les marchés. Les nombreuses batailles contre les mongols avait fait exploser le nombre d’esclaves sur les marchés. Cette explosion du nombre de Mamelouk a largement aidé à prendre le contrôle sur les Ayyubides.

Après avoir conquis l’Est moyen-oriental et détruit Bagdad en 1258, les Mongols se dirigent vers la Syrie, la Palestine et l’Égypte. Cette invasion, qui aurait pu signer l’acte de décès de la nouvelle dynastie mamelouk va au contraire devenir un élément de légitimité puissant. En effet, les Mongols, eux même affaiblis par la mort du grand Khan Mongke, subissent leur première défaite au Moyen-Orient en 1260 lors de la bataille d’Ayn Jalut en Palestine face aux Mamelouks. C’est donc la déferlante mongole qui a donné tant de force et d’influence à la jeune dynastie.

Les Mamelouks étendent leurs relations

Après cette victoire, dans un monde sunnite désorienté par la chute de Bagdad, les Mamelouks commencent à tisser des liens diplomatiques avec les princes syriens. Ils ne tardent d’ailleurs pas à s’emparer complètement des territoires syriens, palestiniens s’aventurant même jusqu’aux frontières anatoliennes. Ils récupèrent également rapidement un survivant de la dynastie abbasside et le placent sur le trône. S’il n’a qu’un rôle symbolique, il assure une légitimité religieuse aux Mamelouks. Ainsi, la dynastie restent pendant deux siècles et demi une des principales puissances du monde méditerranéen. Ils nouent des liens avec le Royaume d’Aragon et maintiennent une bonne entente avec les États maritimes italiens.

Une origine ancienne

Si les Mamelouks sont au pouvoir au Caire depuis 1250, leur existence est bien plus ancienne. Ils forment la garde rapprochée des sultans sunnites depuis le IXe siècle. Achetés sur les marchés aux esclaves d’Asie centrale, ils sont formés à l’usage des armes pour entrer dans un corps d’élite militaire. Le terme « mamelouk » signifie d’ailleurs en arabe « la chose possédée». Selon les lois et traditions en vigueur à cette époque, les musulmans ne peuvent acheter d’esclaves venant du dar al-islam (« le royaume de l’islam ») et doivent donc les faire venir de l’extérieur des frontières. Traditionnellement Turcs, ils deviennent ensuite Circassiens la fin du XIVe siècle car importés des montagnes du Caucase.

Les jeunes soldats mamelouks commencent leur apprentissage très tôt. Ils restent entre eux et se mélangent peu au reste de la population. Exceptés les officiers hauts-placés qui doivent maîtriser la langue locale, les soldats ne parlent souvent pas arabe, ce qui rend encore plus difficile leur intégration. Leur apparence les rapproche d’ailleurs davantage des Mongols que des Arabes. Après leur victoire contre les Mongols en 1260, l’historien Abu Shama raconte d’ailleurs que « les peuples des steppes ont vaincu les peuples des steppes » (1).

Une stabilité apparente

La forte concurrence qui existe dans la hiérarchie mamelouk remplie l’histoire de la dynastie d’intrigues de palais, de complots et de trahisons. Le premier leader mamelouk au Caire, Aybeg, est assassiné dans son bain sur les ordres de sa femme. Cela n’empêche pas les Mamelouks d’être une des dynasties les plus stables qu’est connu le Moyen-Orient médiéval.

Cette stabilité se répercute dans l’héritage architectural laissé par les Mamelouks. Ils sont ce que l’historien Julien Loiseau appelle « une aristocratie urbaine » (2) et participent à la création d’une culture urbaine dans les villes arabes. Leurs monuments sont faits pour être vus et reconnus de loin. En effet, à défaut de pouvoir s’intégrer socialement dans les villes, ils s’y intègrent architecturalement, en entretenant une culture de la visibilité. Avec plus de 300 000 habitants, Le Caire devient un centre intellectuel et culturel de premier plan dans le monde arabe.

Le déclin s’amorce à la fin du XVe siècle. Affaiblis par la peste noire, les tensions internes, une baisse des revenus commerciaux suite à l’ouverture de nouvelles routes commerciales en Atlantique, la dynastie se craquelle rapidement. Il ne faut que deux batailles au sultan ottoman Selim Ier pour mettre les Mamelouks à genoux. La raison principale ? Alors que les Ottomans attaquent avec des fusils et des canons, les Mamelouks se défendent avec des arcs et des flèches. L’interdépendance et la fermeture à toute influence extérieure, qui avait fait une des grandes forces des Mamelouks en a aussi fait une faiblesse fatale.

  1.     Rahimlu, Yusof and Gholami, Rahim, “Abū Shāma”, in: Encyclopaedia  Islamica, Editors-in-Chief:     Wilferd Madelung and, Farhad Daftary. Consulted online on 19 April  2019 <http://dx.doi.org/10.1163/1875-9831_isla_COM_0138>
  2.     Julien Loiseau, « Les Mamelouks. XIII-XVIe siècle », Seuil, 2014.

Ressources :

Le Monde, « L’atlas des Empires », hors-série, 2016.

Le Monde, « L’histoire du Proche-Orient », hors-série, 2018.

Julien Loiseau, « Les Mamelouks. XIII-XVIe siècle », Seuil, 2014.

ThoughtCo.com, « The Mamluks », 2018.
https://www.thoughtco.com/who-were-the-mamluks-195371

 

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Pablo MENGUY

Ancien étudiant en école de journalisme, aujourd'hui en master à l'Institut français de Géopolitique (IFG).

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