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Rétrospective 2013 : Une année sous tension en Afrique subsaharienne.

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L’année 2013 a vu se développer en Afrique subsaharienne deux phénomènes géopolitiques qui, s’ils sont loin d’être nouveaux sur le continent, ont pris une importance particulière et peuvent constituer des matrices stratégiques importantes dans les années à venir : c’est d’abord bien sûr le retour des opérations militaires d’envergure de la France avec les actions au Mali et en Centrafrique, mais aussi la recrudescence d’une « diagonale terroriste » hétérogène courant du Nord-Mali djihadiste à la Somalie des Shebabs, en passant par le Nord du Nigéria frappé par les combattants de Boko Haram.

La France, ancienne puissance coloniale en Afrique de l’Ouest accusée depuis les décolonisations de faire peser sur la région une tutelle économique et stratégique, assure depuis quelques années vouloir mettre fin à ce statut de « gendarme de l’Afrique » qui l’a poussée à intervenir plus de 40 fois sur le continent depuis 1960. Cependant lorsque la rébellion touareg du MNLA et des salafistes d’Ansar Dine s’insurge contre le gouvernement central malien en janvier 2012, c’est bien la France qui répond un an plus tard à l’appel du président malien Dioncounda Traoré pour repousser les troupes rebelles : la proximité géographique du pays avec l’Europe, les risques de déstabilisation régionale, les liens historiques de la France avec le Mali amènent François Hollande à lancer l’opération Serval le 11 janvier 2013. 22 jours plus tard le Nord-Mali est reconquis mais l’opération de reconstruction politique et de pacification du Mali durera encore en 2014, et peut-être au-delà, nécessitant encore une présence française pendant plusieurs mois.

Le cas de la Centrafrique est différent puisque l’opération française n’est pas à proprement parler une « guerre » comme on a parfois qualifié celle du Mali: lancée en décembre 2013, elle est à l’origine une simple opération de désarmement des milices musulmanes de la Séléka, mais ses enjeux risquent de se complexifier en 2014 dans un contexte d’affrontements religieux et de rejet de la force tchadienne de la MISCA par la population locale. L’un des grands défis de politique étrangère de François Hollande dans les prochains mois sera donc de permettre une transition politique en douceur dans le pays en enrayant la logique de représailles aveugles qui semble se mettre en place à Bangui et dans sa banlieue.

L’autre phénomène géopolitique marquant de cette année 2013 en Afrique est sans doute la recrudescence des actions terroristes de la part de groupes armés d’obédience islamiste, que ces actions prennent la forme de prises d’otages (en nette augmentation depuis 2006 sur le continent, notamment au Sahel comme celle d’In Amenas le 16 janvier) ou d’attaques contre des civils (comme celle de Nairobi le 21 septembre 2013, où les assaillants shebabs ont fait près de 70 morts). Ces méthodes, qui sans être nouvelles prennent une tournure plus systématique dans ce type de conflit, vont donc appeler une réflexion stratégique occidentale poussée sur le meilleur moyen de les combattre – le débat à propos des otages est déjà lancé en France.

L’Afrique devient ainsi le laboratoire de luttes très complexes, où les échelles et les acteurs sont mouvants, et à la fois l’action de la France comme les méthodes des groupes armés du continent vont faire de 2014 une année féconde dans la gestation d’une nouvelle manière de faire la guerre. Le conflit du XXIème siècle est en train de naître, et il sera sans doute africain.

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