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Les énergies renouvelables en Inde: une réelle prise de conscience ?

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Le 18 août dernier était inauguré à Cochin, dans le sud de l’Inde, un champ de panneaux solaires de près de 20 hectares, destiné à alimenter l’intégralité de l’aéroport international de Cochin. Ce dernier est ainsi le premier aéroport au monde à être entièrement alimenté par l’énergie solaire. Une initiative à la dialectique double pour le gouvernement de Narendra Modi.

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Les projets d’installation de panneaux solaires se multiplient en Inde

D’une part, l’Inde veut faire bonne figure à moins de 100 jours de la Conférence des Parties sur le Climat (COP21), qui se déroulera à Paris fin novembre. L’Inde, troisième pollueur mondial derrière les Etats-Unis et la Chine mais également pays le plus peuplé du monde à l’horizon 2030, affiche une volonté de prendre conscience des grands enjeux demain.

L’Inde a pour ambition seconde de montrer la viabilité d’un modèle fondé sur les énergies renouvelables. Aujourd’hui, ce sont plus de 300 millions d’Indiens qui n’ont pas accès à l’électricité. Ce manque est un réel défi pour le développement de l’Inde : les alternatives à l’électricité (la lampe à pétrole principalement) coûtent cher en raison du carburant nécessaire à leur utilisation ; l’éducation des jeunes populations pâtit de ce manque en électricité, les enfants étant handicapés dans l’apprentissage de la lecture. Afin de pallier la difficile mise en réseau de ces zones isolées, les états indiens cherchent donc du côté des énergies renouvelables, en particulier solaire. Fonctionnant en petites unités autonomes, les panneaux solaires peuvent fournir l’énergie nécessaire à l’alimentation de petits réseaux –les Solar mini-grids – assurant ainsi l’approvisionnement en électricité d’un petit village.

Un « greenwashing »* à l’indienne ?

En avril dernier, le premier ministre Narendra Modi déclarait à l’UNESCO : « le progrès réel se mesure à l’aune de l’autonomisation des plus faibles ». Si cette référence aux populations les plus défavorisées de l’Inde faisait écho à la publication de l’UNESCO, dévoilée à New Dehli le 9 avril dernier, le Rapport mondial sur le suivi et l’éducation de tous, elle peut aussi être interprétée comme l’ambition, pour le gouvernement indien, de poursuivre sa politique de développement économique. Le « make in India » s’inscrit dans le projet ambitieux de faire de l’ombre à la Chine voisine.

Conséquence, le premier ministre indien multiplie les déplacements à l’étranger pour vanter les mérites de l’Inde. Désireuse de s’assurer une indépendance énergétique, l’Inde se rapproche de la France sur le délicat sujet du nucléaire (un projet de construction de centrale nucléaire à Jaitapur est actuellement en cours). Mais la non-signature de l’Inde du traité de non-prolifération des armes nucléaires ralentit les négociations quant à l’approvisionnement du pays en uranium.

Dans cette perspective, et à l’aune de l’actualité économique récente, l’Inde pourrait se tourner vers d’autres sources d’énergie. En profitant du ralentissement de la croissance chinoise et de la baisse de cours des matières premières, elle pourrait rendre rentable l’exploitation de ses propres réserves en hydrocarbures (en 2014, celles-ci s’élevaient à 5,675 milliards de pétrole brut, un niveau équivalent à celui de la Norvège(1)).

L’aéroport de Cochin n’est-il en définitive que de la poudre aux yeux à l’approche de la COP 21 ? Le premier ministre Nerandra Modi rechigne encore à donner des objectifs précis et chiffrés à tenir pour limiter les impacts du réchauffement climatique. Ces objectifs seront d’ailleurs au coeur des négociations de la Conférence des Parties. L’Inde pressent le ralentissement structurel de la croissance chinoise et ne veut pas perdre l’occasion d’en prendre la succession. Pour attirer les investisseurs étrangers encore frileux dans le pays, pour débloquer l’embargo concernant l’importation d’uranium, le gouvernement Modi, pourrait jouer la carte de l’éco-responsabilité. La place qu’occupera l’Inde dans les négociations fin novembre à Paris, permettra d’en savoir plus sur les véritables desseins de la plus grande démocratie du monde.

*le greenwashing désigne une pratique consistant à masquer des actions (entreprises) ou une politique (état) coûteuses pour l’environnement en arborant une façade éco-responsable, sans actions concrètes entreprises.

(1): Source, Les Echos data

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