Le terrorisme islamiste en Asie du sud-est
Le 22 décembre 2015 le ministre de la justice australien attirait l’attention des journaux sur le risque d’un « califat éloigné » en Indonésie. Le terrorisme islamiste n’est cependant pas nouveau dans la région.
Selon George Brandis, ministre de la justice australien, l’organisation Etat islamique a « l’ambition d’accroître sa présence et son niveau d’activité en Indonésie et rêve de créer un califat éloigné ». Il est ainsi nécessaire de rappeler que l’Indonésie est le pays qui compte le plus de musulmans au monde : plus de 200 millions sur les 240 millions d’habitants que compte le pays. Les islamistes indonésiens n’ont toutefois pas attendu l’arrivée de l’organisation Etat islamique pour se rassembler dans le pays. Un certain nombre d’indonésiens se sont notamment battus en Afghanistan contre l’invasion soviétique. Les deux plus importants mouvements islamistes de la région sont en Indonésie le groupe Jemaah Islamiyah et aux Philippines le groupe Abou Sayyaf. L’objectif de ces mouvements est d’établir un « Etat islamique » régional en particulier sur les territoires de l’Indonésie, le sud des Philippines, la Malaisie, Singapour, la Thaïlande et une partie du Brunei. Cet objectif reste cependant un objectif seulement intellectuel puisque ces mouvements n’ont pas les moyens de réellement déstabiliser les différents pays cités précédemment, à la différence de ce qui se passe au Moyen-Orient. Ces pays du sud-est asiatique sont ainsi assistés par les américains, les australiens et les néo-zélandais dans leur lutte contre ces organisations terroristes. Plusieurs attentats ont toutefois été organisés par le groupe Jemaah Islamiyah comme celui de Bali en 2002 faisant 202 victimes ou en 2004 l’attaque contre l’ambassade de l’Australie. La Jemaah Islamiyah et Abou Sayyaf étaient tout deux auparavant rattachés à Al Quaïda mais comme de nombreux autres groupes islamistes ils se sont rattachés à l’organisation Etat islamique du fait de sa récente notoriété. L’ascension de cette dernière est en effet préférée par les membres de ces groupes par rapport au relatif immobilisme actuel qu’incarne Al Quaïda. Ceci se traduit par la présence d’environ 300 indonésiens aux côtés de l’organisation Etat islamique en Syrie et en Irak ainsi que la possible présence d’un bataillon de combattants regroupant des djihadistes originaires d’Asie du sud-est. Au niveau de l’Indonésie, les attentats qui ont fait au moins 7 morts à Jakarta le 14 janvier dernier illustrent le ralliement des groupes indonésiens à l’organisation Etat islamique.
Les mesures prises par l’Indonésie pour lutter contre le terrorisme
Ces mesures sont dans un premier temps le fait d’une diffusion d’un islam pacifique afin de contrer l’idéologie islamiste que diffusent les groupes terroristes. Par exemple, le Nahdlatul Ulama (réveil des oulémas) fondé en 1926 et possédant plus de 40 millions de membres est une sorte d’institution religieuse mêlant une dimension caritative et politique qui diffuse ce message. Soutenue par le gouvernement indonésien, une « Déclaration de Malang » a été rédigée en novembre dernier pour souligner l’importance et l’urgence à promouvoir un islam pacifique afin de contrer le radicalisme partout dans le monde. A cela s’ajoute une mission lancée en 2014 visant à « diffuser des messages à propos d’un islam tolérant afin de lutter, dans les différents pays, contre la radicalisation, l’extrémisme et le terrorisme (…), qui s’enracinent souvent dans une mauvaise interprétation des enseignements de l’islam ».
Enfin, l’Etat indonésien lutte également par le moyen de ses forces de sécurité contre le terrorisme religieux. Il a en effet réalisé de nombreuses opérations de police pour démonter les réseaux de la Jamaah Islamiyah notamment. On peut cependant constater un paradoxe en Indonésie puisque d’un côté les autorités indonésiennes mènent une lutte efficace contre les organisations terroristes islamistes et, de l’autre, elles laissent circuler sur Internet et dans les écoles « un discours victimaire de l’islam par rapport à l’Occident, qui fait le lit d’un certain terrorisme ou, à tout le moins, de considérations très sectaires » selon Rémy Madinier (chercheur du CNRS et de l’EHESS).