L’affligeant retard de la France en matière de Défense
Treizième puissance militaire en termes d’effectifs, troisième en termes de dépenses dans ce secteur et surtout troisième puissance nucléaire mondiale, la France en est réduite à solliciter l’aide du Pentagone. En effet, l’armée américaine devrait lui vendre des drones de moyenne altitude et longue endurance, signe que la France a raté le coche en ce qui concerne les méthodes de défense de demain.
Le Général de Gaulle se retournerait dans sa tombe en apprenant cela ! Dans un contexte de Guerre Froide qui, certes, agissait comme un aiguillon pour pousser les pays à développer leur arsenal militaire, il avait lancé le programme devant conduire à l’indépendance de la France en matière de technologie nucléaire. Alors que le Royaume-Uni achète ses têtes nucléaires aux Etats-Unis, la France, elle, maîtrise cette technologie, ce qui en fait, potentiellement, une des puissances les plus dangereuses au monde. Enfin, serait-on tenté de croire.
Il semblerait que la perpétuation de cette tradition d’indépendance militaire soit arrivée à son terme avec le gouvernement ce François Hollande. Mais avant de jeter l’opprobre sur le gouvernement actuel, rappelons-nous qu’une telle technologie ne se développe pas en trois ans mais s’étale plutôt sur une vingtaine voire trentaine d’années. Mais l’accumulation de mauvais choix stratégiques fait que la France reste sur le carreau. Le Rafale, programme lancé dans les années 80 et produit par Dassault, en est l’exemple même. Tout le monde s’accorde à dire que cet avion omnirôle est un bijou technologique. Toutefois, jugé trop cher par la plupart des gouvernements, seule la France en a acheté à l’avionneur depuis sa mise en service en 2001. Si l’Inde a annoncé l’année dernière le commencement de négociations exclusives avec Dassault pour en acheter, la vente est encore loin d’être conclue.
Dans le même temps, la France s’est bien gardée de produire des drones de combat efficaces. Et pourtant, ce ne sont pas les entreprises de défense qui manquent en France. Qu’elles agissent seules ou en partenariat avec d’autres poids lourds européens du secteur. Entre EADS, Thalès, Safran ou Dassault, la France se distingue par ses entreprises focalisées sur la très haute technologie qui trouve souvent des applications dans le domaine militaire. Ils font partie des leaders mondiaux dans leurs domaines respectifs mais personne, semble-t-il, n’a eu la capacité de voir l’émergence des drones dans le paysage militaire. Si Dassault a tout de même déjà présenté son prototype de drone baptisé le Neuron, celui-ci n’est encore pas opérationnel. Projet européen compte tenu de son coût, il est le début de réponse tardive aux Américains qui utilisent déjà des drones depuis nombre d’années et ont accumulé énormément d’expérience en la matière.
Rajoutons à cela un budget qui stagne pour cause de crise ces dernières années et vous avez le cocktail qui donne la gueule de bois à la France et l’empêche de prendre le train en marche. Si l’Europe n’a certes pas connue de guerre majeure à l’intérieur de ses frontières depuis la guerre des Balkans dans les années 90, elle intervient régulièrement dans des opérations à l’étranger comme en attestent la guerre en Libye pour renverser le Général Kadhafi ou encore, cette année, pour défendre le Mali face aux vagues d’insurrection islamistes. Il faut donc s’inquiéter de cette perte de vitesse tant qu’il n’est pas trop tard.
La France doit rester indépendante militairement.
On ne peut brader la Défense ! Certes nos frontières sont désormais pacifiées mais pour assurer la sécurité de nos soldats qui partent à l’étranger, il est crucial de pouvoir développer cette force de reconnaissance voire de frappe. Et de ne pas dépendre du bon vouloir d’autres pays, notamment de pays comme les Etats-Unis dont les organes de décision sont d’humeur très versatile – le Congrès doit encore avaliser la vente du Pentagone. De plus, traditionnellement, le budget de la défense participe indirectement à la bonne tenue des entreprises mentionnées plus haut puisque, étant un « gros client », il subventionne leurs efforts de développement des technologies de demain. La France a besoin d’un changement de cap pour maintenir une armée efficace et à la pointe de la technologie. Ca commence dès aujourd’hui.