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Rivalités dans la Caspienne : quelle souveraineté pour la région ?

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Depuis l’éclatement de l’URSS en 1991 et l’apparition de nouveaux Etats, la mer Caspienne est apparue comme l’une des régions les plus prometteuses en termes de ressources pétrolières avec environ 6% des réserves mondiales de pétrole et 10% des réserves de gaz, ce qui en fait donc une des zones les plus convoitées. Fortement enclavée entre le Caucase et l’Iran, ce dernier ainsi que l’URSS détenait auparavant la majeure partie de ses richesses. Toutefois, avec le tournant des années 1990, l’Azerbaïdjan, le Kazakhstan ainsi que le Turkménistan revendiquent leur accès aux ressources. Leur exploitation soulève un problème dual, à savoir, le partage des ressources entre les pays riverains et le contrôle des voies maritimes pour leur acheminement.

La Caspienne au coeur des rivalités entre les pays de l’ex-URSS.

Bien que l’exploitation de la région ait déjà bien été entamée, les cinq pays ne parviennent pas à s’entendre sur le statut juridique dont les fondements se retrouvent dans le traité irano-soviétique de 1921. De nos jours, la question est de savoir s’il s’agit d’une mer ou d’un lac. Car, en droit international, les ressources d’un lac ne peuvent être exploitées qu’avec l’accord unanime des Etats riverains, tandis que dans le cas d’une mer, chaque Etat se voit attribuer une zone dont il peut user comme il le souhaite, dans la limite des 12 miles selon la Convention de Montego Bay, ce qui réduit fortement la superficie des parcelles. Ainsi, le statut de la Caspienne diverge selon les ambitions nationales des Etats bordiers et évolue au fur et à mesure de la découverte de nouveaux gisements. Si à l’origine, la Russie privilégiait le statut de lac et se référait pour cela à l’accord d’Almaty de 1991, stipulant que « les pays membres de la CEI garantissent … le respect des engagements internationaux pris par l’ex-URSS », lui permettant ainsi de jouir pleinement des accords avec l’Iran de 1921 et excluant les trois autres Etats de l’exploitation des ressources. Ses positions changent en 1998 avec la découverte de gisements d’hydrocarbures au large de ses côtes, ce qui pousse le pays à sécuriser cette réserve par la signature de multiples accords de 1998 à 2003. Ce dernier partage le nord de la Caspienne en fonction de la longueur des côtes soit 18 % pour l’Azerbaïdjan, 19 % pour la Russie et 27 % pour le Kazakhstan, décision pour laquelle l’Iran et le Kazakhstan sont opposés. En outre, la Russie a dépassé l’Arabie saoudite pour devenir en 2016 le premier fournisseur de pétrole brut de la Chine et compte beaucoup sur les réserves de la Caspienne pour conserver son leadership.

Le secteur de l’acheminement des ressources et celui du contrôle des voies d’approvisionnement restent encore sources de nombreux problèmes. Du fait de son enclavement, les oléoducs comme les gazoducs doivent traverser au minimum un autre État que celui de production, tel que l’Arménie. La géopolitique des transports est multi scalaire puisqu’elle mêle les ambitions des producteurs, des pays traversés et des clients. Une grande partie du pétrole de la Caspienne vendu sur les marchés internationaux transite par et est originaire de Russie. Cette dernière a mis en place un important réseau d’oléoducs jusqu’au port de Novorossisk situé sur la mer Noire. L’augmentation de la demande mondiale entraîne l’augmentation du trafic des supertankers au large des côtes turques. Ankara a donc peur de voir ses revenus touristiques diminuer. Jusqu’en 2005, la Russie exerçait un quasi-monopole avec le contrôle de 80% des oléoducs. Toutefois, la construction de l’oléoduc Bakou-Tbilissi-Ceyan remet en cause la souveraineté russe sur la région. La création et le projet d’établir une union pétrolière de l’Union Economique Eurasiatique en 2015 dont la Russie, l’Arménie et le Kazakhstan sont membres pourrait changer la donne sur la région. Cela forcerait les pays à parvenir à une entente et notamment faire diminuer les ambitions de l’Azerbaïdjan, bloqué entre l’Arménie et la Russie.

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