Mozambique : le retour de la guerre civile ?
Le 28 octobre, l’armée mozambicaine a investi et démantelé une base de la rébellion Renamo (Résistance nationale mozambicaine) ravivant les souvenirs de la guerre civile qui a déchiré le pays entre 1977 et 1992, coûtant la vie à plus d’un million de personnes.
Les violences récentes témoignent plus de pressions internes afin d’obtenir une meilleure répartition des fruits de la croissance que du début d’une nouvelle guerre civile. Le conflit actuel est ainsi celui de deux partis politiques : le Frelimo (Front de Libération du Mozambique), au pouvoir depuis l’indépendance depuis 1975 et adversaire de longue date de la Renamo, qui est depuis le principal parti d’opposition. Selon les prévisions, la croissance du PIB sera de 8,5% pour l’année 2013 et le pays dispose d’un important potentiel agricole mais aussi de ressources naturelles (charbon, pétrole et gaz). La Renamo, ancienne guérilla anticommuniste, soutenue à l’époque par les Etats Unis et l’Afrique du Sud, a ainsi recommencé à entraîner des hommes fin 2012 et à lancer des attaques sporadiques afin de manifester son mécontentement. Le Frelimo semble réticent à un plus grand partage, alors que d’importantes réserves d’hydrocarbures ont récemment été découvertes au large du pays. La Renamo accuse de plus le pouvoir d’avoir rendu caduques les accords de paix de 1992 lors de son attaque du 21 octobre qui a contraint Afonso Dhlakama, chef de la Renamo, à prendre la fuite. Le pays semble dans l’impasse et la reprise des armes fait craindre aux puissances voisines, Afrique du Sud et Angola notamment, une escalade de la violence, mais les appels au dialogue des deux parts, limitent cette perspective.
Derrière ces tensions, la place des mouvements de libération nationale en question
La faible probabilité de guerre civile est appuyée par l’indigence des moyens de la Renamo. Si le mouvement peut lancer des attaques de type guérilla, il n’a pas la capacité militaire ou le soutien populaire nécessaire à une offensive d’envergure. Ces tensions et leur traduction armée posent la question de la place des mouvements de libération nationale dans les pays décolonisés. Leur rôle conjoncturel important en font des institutions stables et peu promptes au changement.
D’une part, la Renamo, transformée en parti politique, mais conservant des moyens d’action armée, illustre la démocratisation et la pacification inachevée des structures indépendantistes. Malgré son intégration à la démocratie multipartite, la persistance d’un positionnement comme « perdant » de la guerre civile a entretenu un rejet systématique des actions du « gagnant ». Elle n’a cessé d’alimenter des tensions électorales, tout en siégeant au Parlement en tant que parti d’opposition institutionnalisé. La Renamo ne semble de plus ne pas avoir de projet de long terme pour le pays, en dehors de la remise en cause du pouvoir en place, qui perd sa lisibilité et sa portée dans l’action armée.
D’autre part, le Frelimo, est lui aussi confronté à des écueils spécifiques. Lorsque la Renamo dénonce son contrôle de l’appareil d’Etat et un système électoral jouant trop en sa faveur, elle met en exergue une tendance de ce type de mouvement qui une fois arrivé au pouvoir gouverne d’une main de fer et empêche une participation effective de l’opposition. Au-delà de la gestion de la crise actuelle, c’est un travail de réforme interne aux partis issus de la guerre civile qui permettra au pays une évolution vers un véritable développement économique et institutionnel.