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La Guinée équatoriale, pays hôte de la CAN 2015

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L’édition 2015 de la Coupe d’Afrique des nations n’aura finalement pas lieu au Maroc mais en… Guinée équatoriale. Rappelons l’annulation de l’organisation de la CAN au Maroc par la Confédération Africaine de Football. Les autorités marocaines souhaitaient un report de la compétition sportive en raison des risques sanitaires engendrés par l’épidémie du virus Ebola qui sévit principalement en Afrique de l’Ouest. Le refus de la CAF a été catégorique et l’équipe marocaine de football a été disqualifiée par la même occasion. Que révèle l’attribution soudaine de la plus grande épreuve sportive panafricaine à la Guinée équatoriale sur la diplomatie de cet État africain méconnu ?

Le président, Teodoro Obiang, un dictateur qui dirige d'une main de fer son pays et accumule la rente pétrolière
Le président, Teodoro Obiang, un dictateur qui dirige d’une main de fer son pays et accumule la rente pétrolière

La Guinée équatoriale a proposé sa candidature et l’a donc obtenue, levant ainsi les doutes sur la proposition de jouer la CAN hors d’Afrique pour la première fois, à savoir au Qatar. La 30ème édition de la compétition footballistique aura bien lieu du 17 janvier au 8 février 2015. La Guinée équatoriale avait déjà organisé l’avant-dernière édition de la CAN en 2012 avec le Gabon. Sa candidature acceptée lui permet de réintégrer le giron des participants sur son propre sol en tant que pays hôte. Notons que la sélection guinéenne avait été disqualifiée à cause d’un joueur non éligible.

Cet événement médiatique permet d’éclairer cet État quasiment inconnu dans le monde. La Guinée équatoriale est un micro-État (28 000 km2, plus petit que la Bretagne) de moins d’un million d’habitants. Le régime en place est de type dictatorial et autoritaire, instauré par le président Obiang à la suite d’un coup d’État en 1979. Le pays bénéficie d’un sous-sol maritime riche en matières premières notamment en hydrocarbures. La Guinée équatoriale s’apparente par sa taille et sa richesse énergétique à un « émirat pétrolier africain ». 3ème pays exportateur de pétrole de l’Afrique subsaharienne après le Nigéria et l’Angola, son pétrole est essentiellement off-shore car la Guinée équatoriale bénéficie d’une zone maritime immense (9 fois la superficie du pays) grâce à ses îles.

Teodoro Obiang Nguema Mbasogo règne depuis 35 ans. Il dirige son pays d’une main de fer. Les opposants politiques sont en prison, les médias sont contrôlés par l’État qui redistribue au compte-goutte les revenus de la rente pétrolière à la population. En termes d’IDH, la Guinée équatoriale est classée au 144ème rang mondial sur 187 pays alors que le PIB par tête est le plus élevé du continent africain à plus de 33 000 dollars (similaire à celui de la France), selon la Banque mondiale en 2013. L’indice de corruption de Transparency International classe le pays à la 163ème place sur 177 pays (corruption systémique). Teodorin Obiang, le fils du président, est en effet poursuivi par la justice française dans l’affaire dite des « biens mal acquis ». Est pointé du doigt le détournement de fonds public afin d’acheter des voitures de luxe et des appartements parisiens.

Cette candidature reflète la récente activité diplomatique équato-guinéenne.

La soudaine candidature de la Guinée équatoriale s’inscrit dans une diplomatie active qui vise à redorer le blason écorné de l’administration Obiang, entachée par l’affaire dite « des biens mal acquis ». La chancellerie équato-guinéenne a pris en compte un facteur dominant dans la société africaine et l’a intégré dans sa diplomatie sportive (CAN 2012, CAN 2015) : le football est le sport roi en Afrique. Toutefois, il ne s’agit que d’un vecteur d’influence parmi un faisceau d’opérations de nation branding visant à s’acheter une respectabilité à l’international tout en offrant des jeux à la population locale, gage de popularité. À Malabo, la capitale du pays, l’organisation d’événements diplomatiques à l’image des 17ème et 23ème sommets de l’Union africaine, sportifs et même scientifiques comme le « Prix international UNESCO-Guinée équatoriale pour la recherche en sciences de la vie » constitue un levier de puissance d’influence à fort rayonnement régional et continental pour la Guinée équatoriale.

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Rémy SABATHIE

Secrétaire général et rédacteur géopolitique pour Les Yeux du Monde, Rémy Sabathié est analyste en stratégie internationale et en cybercriminalité. Il est diplômé de géopolitique, de géoéconomie et d’intelligence stratégique.

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