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Le Tchad accentue son engagement face à Boko Haram

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La géographie particulière de la région oblige à une collaboration très poussée face aux terroristes
La géographie particulière de la région oblige à une collaboration très poussée face aux terroristes

Boko Haram, secte créée en 2002, muée depuis 2009 en véritable groupe terroriste, trouve son origine dans le Nord-Est du Nigéria et y déploie l’essentiel de ses actions. Pour autant, ses chevauchées en territoire voisin, autant que les mouvements de populations qu’elle provoque au cœur de la région nigériane de Borno, amènent les responsables des pays frontaliers à se mobiliser de façon croissante.

C’est le cas du Tchad qui au cours de la semaine passée a envoyé plus de 3000 hommes dans le Nord du Cameroun, où les forces militaires locales ne parviennent plus à circonscrire les attaques du groupe terroriste. Le Cameroun est en effet depuis octobre la cible d’incursions répétées des terroristes, qui ont notamment causé la mort de plusieurs de leurs soldats. Parallèlement, le récent massacre de Baga (2000 morts et 20 000 déplacés selon Amnesty International), marque un nouveau stade dans l’intensité des violences perpétrées.

Devant le manque de moyen camerounais, Idriss Déby s’est donc décidé, avec l’accord de Paul Biya, à directement intervenir sur le territoire de son voisin. Une décision qui s’inscrit dans une double-logique.

La première est d’ordre strictement sécuritaire. La bande septentrionale du Cameroun, qui s’étend jusqu’au Sud du lac Tchad, agit comme rempart entre le Nord-Est du Nigéria et le Tchad. Si les deux pays ont une frontière commune plus au Nord, le filet camerounais n’en n’est pas moins important dans la mesure où N’Djamena, la capitale tchadienne, se trouve à l’extrême Sud-Est du pays, justement à proximité de la frontière camerounaise. Plus largement, un Nord-Cameroun stable est une condition essentielle de la bonne tenue économique du Tchad. Sans façade maritime, enclavé qu’il est au cœur du continent africain, le Tchad dépend de son voisin camerounais, pour exporter son pétrole autant que pour importer vivres et produits manufacturés. Enfin, agir contre Boko Haram, c’est aussi endiguer le flux de déplacés nigérians que provoquent les attentats et enlèvements à répétition. Sans parler des déplacés intérieurs au Nigéria (près d’un million d’individus) qui constituent en eux-mêmes un facteur d’instabilité supplémentaire, le Cameroun en aurait déjà accueilli plus de 30 000 et le Tchad près de 10 000. Ainsi, compte tenu de l’intensité des liens qui unissent les deux Etats, intervenir dès maintenant au Cameroun constitue déjà pour Déby une action préventive pour la défense de son propre pays.

Le Tchad, pôle de stabilité africain ?

Le deuxième relève d’une vision plus politique. En participant à la lutte contre Boko Haram, le Tchad conforte son statut d’acteur incontournable dans la lutte contre le terrorisme et l’instabilité en Afrique. Faisant de sa position centrale une force, Déby fait depuis deux ou trois ans de son pays une base essentielle de ce combat. Fondé sur une collaboration étroite avec la France – qui dispose d’une base à N’Djamena – et une armée de 30 000 hommes parmi les plus professionnelles de la région, le rôle du Tchad apparaît comme essentiel dans la région. En Afrique de l’Ouest au Mali, avec l’envoi de plus de de 2400 soldats au moment de l’intervention française et aujourd’hui au sein de la Minusma; sur sa frontière méridionale en Centrafrique, là encore avec les Français, où, de fin 2013 à avril 2014, 850 soldats tchadiens ont participé à la Misca (force d’intervention de l’UA). La nouveauté est qu’ici le Tchad quitte son statut d’accompagnateur d’une force occidentale en initiant lui-même une coopération régionale, le Niger, qui accueille lui aussi de nombreux réfugiés (90 000), étant également impliqué dans les discussions. Devant la frilosité des puissances occidentales à intervenir plus avant dans la région, il sera intéressant d’observer la forme que prendra cette collaboration purement régionale ainsi que sa pérennité.

Finalement, la plus grande inconnue de cette équation régionale demeure la force armée nigériane elle-même. Réputée pour ses méthodes agressives, elle est dépassée dans le Nord-Est du pays par des milices civiles (Civilian Join Task Force, CJTF), peu disciplinées et tout aussi brutales, dont les actions contribuent à banaliser l’usage d’armes de guerre et à alimenter l’escalade de violence dans la région.

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