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Boko Haram : le fléau nigérian (1/2)

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Depuis son orchestration de l’enlèvement le 15 Avril dernier d’environ 250 lycéennes au Nigéria, Boko Haram bénéficie d’un éclairage médiatique sans précédent, notamment avec la campagne « #Bringbackourgirls ». Au-delà du danger de l’islamisme radical que connait une importante partie de l’Afrique, cela a avant tout un effet révélateur sur la faillite de l’État nigérian à gouverner le pays le plus peuplé d’Afrique.

Boko Haram est désormais le nouveau symbole du terrorisme islamique en Afrique de l’Ouest : après l’attentat le 14 avril à la gare routière d’Abuja, faisant près de 71 morts et 124 blessés, et le rapt de lycéennes dans la nuit qui suit, le groupuscule nigérian a désormais une réputation internationale.

Boko Haram, dont le nom signifie « l’éducation occidentale est un pêché », revendique le vrai nom de « Jama’atu Ahlis-Sunnah Lidda’awati Wal Jihad » signifiant « la communauté des fidèles dévoués à la propagation des enseignements de la tradition du Prophète et du Jihad ». La secte a été fondée au début des années 2000, par Mohamed Yusuf, avec pour volonté de combattre l’influence occidentale et revendiquant une application des plus rigoureuses de la loi coranique, la Charia.

Aujourd’hui, leur nouveau chef Abubakar Shekau dispose d’une moins grande légitimé au sein de Boko Haram, mais s’est imposé par ses méthodes violentes. Depuis environ 5 ans, le groupe a basculé dans une grande violence, multipliant les actions contre l’État nigérian (à travers des attentats contre des casernes, des écoles), des imams qui ne sont pas en accord avec sa ligne idéologique, les symboles chrétiens. En effet, Boko Haram ne fait pas de réelle distinction entre chrétiens et musulmans : la secte agit avec une logique de représailles contre toute institution ou personne la critiquant. Ainsi, le massacre de Kano ayant eu lieu en 2012 a fait environ 178 victimes, toutes musulmanes.

Longtemps financée par ses fidèles, la secte diversifie ses sources de financements depuis quelques années en s’attaquant aux banques (pratiquant l’usure) et en négociant des accords financiers contre la paix avec certains états fédérés du Nigeria (« racket de protection »). La multiplication des frappes contre les chrétiens étant surtout sensé attirer des financements et de l’aide par Al-Qaïda, mais qui se refuse pour le moment à aider un groupe qui tue des musulmans en grand nombre.

Très concentré au niveau local, Boko Haram n’a pas vocation à se développer à une grande échelle africaine (contrairement à une branche dissidente, Ansaru, qui en connexion avec Al-Qaeda, agit contre les chrétiens et les expatriés dans désormais différents pays).

Boko Haram est finalement surtout révélateur de la défaillance de l’appareil d’État nigérian. Un État faible, avec un appareil sécuritaire marqué par la corruption (l’armée fournit l’essentiel des armes sur le marché noir de l’armement du Nigéria, et donc fournit indirectement Boko Haram). Le pays qui est devenu la 1ère puissance économique d’Afrique cette année a toujours plus de 50% de ses habitants vivant avec moins de 2 dollars par jour, de nombreux enfants se tournant vers l’école coranique gratuite et non publique car payante. Boko Haram trouve ainsi un terreau fertile pour le recrutement de nouveaux djihadistes.

Car au-delà de l’argument religieux, il y a avant tout un profond sentiment d’abandon par une partie de la population, ne voyant dans les élites, l’État central et les forces de sécurité, que des symboles de corruption et de violence. Tant que l’État nigérian ne saura apporter un véritable projet à l’attention du Nord et la jeunesse, Boko Haram continuera à se développer et à sévir dans le pays.

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