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Affaire Lula : entre corruption et manœuvre politique.

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L’ex-président de 72 ans a été reconnu coupable mercredi 24 janvier de corruption et blanchiment d’argent. Il risque 12 ans de prison, ce qui l’empêcherait de se présenter aux prochaines élections pour lesquelles il est largement favori.

Après avoir été condamné en juillet dernier pour corruption et blanchiment d’argent, l’ex-président brésilien Luiz Inacio Lula Da Silva a été reconnu coupable par la cour d’appel de Porto Alegre. Il est accusé d’avoir accepté 3.7 millions de reals dont un triplex en bord de mer à Sao Paolo de la part du groupe de bâtiment OAS en échange de contrats frauduleux avec la société pétrolière Petrobras. Sa peine, initialement de 9 ans, puis alourdie à 12 ans ne sera appliquée qu’après l’épuisement de toutes les voies de recours.

Un enjeu électoral

Malgré cela, Lula persiste et confirme sa candidature pour les élections présidentielles d’octobre. Il est en effet en tête des sondages, rassemblant 34 à 37% des intentions de vote, loin devant le second, Jair Bolsanero, candidat d’extrême droite qui est à près de 17% des intentions de vote. Derrière eux, Geraldo Ackmin (centre-droit), Marina Silva (écologiste) et Ciro Gomes (gauche) se disputent la troisième place sans réellement dépasser les 10%. Si Lula venait à se présenter, sa victoire serait donc inéluctable. De plus, plus il est condamné, plus sa côte de popularité augmente. Dans un pays où gangrènent la corruption et les inégalités sociales, son procès est vu par une large partie de la population comme le procès de l’oligarchie contre le peuple. Lula lui-même défend l’idée selon laquelle ce procès est un complot contre lui, une manœuvre politique afin de l’empêcher de se présenter.

Le président Lula

« Le petit père du peuple » brésilien

La popularité de Lula n’est pas sans fondement. Le septuagénaire a en effet une véritable assise populaire, rappelons qu’il quitta le pouvoir en 2011 avec plus de 90% de taux de satisfaction. La période de son règne a en effet été marquée par un fort taux de croissance d’environ 7% par an, un taux de chômage très bas, et surtout une réduction des inégalités ainsi qu’un net recul de la pauvreté de 35% à 22%, soit près de 50 millions de Brésiliens qui sortirent de la pauvreté. Cela a pu être possible grâce à une forte politique sociale, dont l’emblème est sans doute le programme de la Bolsa Familia. De plus, le personnage de Lula ne peut laisser indifférent, l’ex-président est en effet issu d’un milieu très modeste, il travailla en tant qu’ouvrier et s’engagea très tôt dans la lutte syndicale pour ensuite se lancer dans la politique. Il est donc perçu comme un président issu du peuple, ce qui fait de lui une icône de la gauche au Brésil mais aussi dans toute l’Amérique latine.

La corruption au Brésil : une anomalie croissante

Si les Brésiliens sont aussi méfiants envers les institutions judiciaires, c’est parce que la corruption est présente dans toutes les arcanes du pouvoir. Depuis 2014, plusieurs scandales de corruption ont éclaté au Brésil, notamment autour de l’affaire Petrobras. Dilma Roussef, la femme qui a succédé à Lula a dû être destituée après avoir été accusée « responsable », étant donné qu’elle était ministre de l’Energie et présidente du conseil d’administration de l’entreprise pétrolière, même si elle n’était pas directement impliquée. Son successeur en revanche, Michel Temer est lui cité parmi les noms impliqués après la diffusion d’un enregistrement dans lequel il donne son aval à un chef d’entreprise pour verser des pots-de-vin. Ainsi, c’est toute la classe politique brésilienne qui semble être discréditée. Toutes ces affaires, mêlées à la situation économique et sociale très difficile depuis la chute des cours du pétrole ont provoqué des tensions sociales et un rejet de la classe politique brésilienne. La nostalgie des années Lula où tout semblait aller pour le mieux peut ainsi être un des facteurs expliquant sa popularité à quelques mois des élections.

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