Reconnaissance des colonies israéliennes : petits arrangements entre amis ?
La Maison Blanche a jugé lundi 18 novembre, par le biais du Secrétaire d’État Mike Pompéo, que l’établissement de colonies israéliennes en Cisjordanie n’était pas contraire au droit international. Cette décision vient rompre avec la position diplomatique traditionnellement adoptée par les États-Unis depuis plus de quarante ans. En plus de cela, elle constitue une nouvelle concession accordée par le président Trump à l’État hébreu.
Un revirement diplomatique
L’annonce a eu l’effet d’une bombe au sein de la communauté internationale. En effet, celle-ci considère depuis longtemps comme illégale l’occupation de territoires palestiniens. À ce titre, l’ONU ainsi qu’un grand nombre de pays qui sont largement acquis à la cause d’une « solution à deux États » voient dans cette reconnaissance un obstacle majeur à la paix entre israéliens et palestiniens.
L’administration Trump en adoptant cette nouvelle mesure pro-israélienne vient non seulement rompre avec le droit international, mais également avec la position historique des États-Unis vis-à-vis de son allié hébreu. En effet, tous les présidents américains se conformaient jusqu’alors à un avis juridique émis en 1978 durant le mandat du démocrate Jimmy Carter. Cet avis prévoyait la non-conformité de ces colonies au regard du droit international.
Pour justifier un tel revirement, le chef de la diplomatie américaine s’est réfugié derrière l’ombre du républicain Ronald Reagan. En 1981, ce dernier, fraîchement élu, avait pris le contre-pied de son prédécesseur en affirmant que les colonies « n’étaient pas illégales ». Pour autant, il avait dans le même temps appelé à un gel de la colonisation des territoires palestiniens. Une précision que s’est bien gardé de rappeler Mike Pompeo lors de sa conférence de presse.
Les colonies : dernières concessions en date
Trump a manifesté un soutien inconditionnel à Israël. Le 21 août 2019, il affirmait même – deux ans après s’être recueilli devant le mur des lamentations – qu’aucun président des États-Unis n’avait fait autant pour le pays. Son soutien est donc largement supérieur par rapport à ses prédécesseurs. Il se traduit notamment par une accélération de la colonisation depuis sa prise de fonction. Celle-ci est sans doute impulsée par les nombreuses concessions qu’il a accordées.
En décembre 2017, le Président des États-Unis avait reconnu unilatéralement Jérusalem comme capitale d’Israël. Le statut de la ville Sainte est pourtant l’une des questions les plus épineuses du conflit. Dans la foulée, il menace sur Twitter – comme à son habitude – de couper une aide financière à destination des palestiniens. Cet avertissement deviendra réel six mois plus tard. Enfin, les États-Unis en rejetant en novembre 2018, pour la première fois, une résolution de l’ONU concernant l’annexion israélienne du Golan reconnaissent la souveraineté de l’État hébreu sur la zone.
Derrière la décision, des enjeux électoraux
Ce revirement diplomatique est tout sauf anodin au moment où les partis israéliens mènent des tractations pour former un gouvernement. En effet, cette reconnaissance soudaine prend clairement l’allure d’un coup de pouce en faveur du Premier Ministre sortant, Benjamin Nétanyahou, actuellement au coude à coude avec Benny Gantz. Le premier avait proposé durant la dernière campagne électorale d’annexer une partie des colonies cisjordaniennes.
Au-delà, ce sont également des enjeux personnels qui animent le Président Trump, actuellement en pleine campagne pour sa réélection. Entretenir la relation israélo-américaine tout en protégeant l’État hébreu face aux menaces lui permet ainsi de s’assurer le vote des évangéliques, qui représentent plus d’un quart de la population américaine. C’est aussi un moyen pour lui de garantir la loyauté de son entourage, pro-israélien et proche de la collation de Nétanyahou.
Sources
– « Jérusalem, plateau du Golan, colonies… les concessions de Donald Trump à son allié israélien« , Le Monde, 19 Novembre 2019
– « Colonies israéliennes : derrière la décision de Donald Trump, des enjeux de politique intérieure« , Le Monde, 19 Novembre 2019
– « La colonisation israélienne n’est pas contraire au droit international selon Washington« , Courrier International, 19 Novembre 2019