La Côte d’Ivoire au bord de la rechute
De Gaulle démissionna après s’être incliné au référendum de 1969 sur la réforme du Sénat et la régionalisation. Laurent Gbagbo, lui, a décidé de suivre un autre chemin. C’est ainsi que, malgré sa défaite aux élections présidentielles de novembre, il a juré à un peuple qui ne l’a pas élu… qu’il resterait bien au pouvoir. Depuis lors 170 personnes, au bas mot, sont décédées au cours d’affrontements dans un pays désormais « au bord du génocide », selon les mots de Youssoufou Bamba, ambassadeur du pays à l’ONU.
Gbagbo, pour se défendre, crie au « complot » international, et pendant ce temps, les experts en droit se relaient sur la télévision publique ivoirienne, véritable instrument de propagande, pour expliquer la prétendue légitimité de la victoire du président sortant, en se gardant bien sûr d’évoquer de quelle manière ce dernier a joué de ses relations auprès du Conseil institutionnel pour arriver à ses fins, ou encore l’annulation des votes dans sept cantons électoraux favorables à son opposant. L’usurpateur espère sans doute faire passer Alassane Ouattara pour le candidat de l’ingérence et du néocolonialisme et stimuler ainsi le sentiment nationaliste ivoirien, un élan qu’il a déjà beaucoup contribué à développer par le passé.
Même si les perspectives pour un avenir plus ou moins proche sont floues, Laurent Gbagbo reste dans la situation actuelle indétrônable. Ni la France ni l’ONU ne peuvent changer la situation, et les sanctions économiques proclamées mettront un certain temps à se faire sentir. Le leader du Front populaire ivoirien, qui a déjà le contrôle de l’armée et de la télévision publique, dispose en plus de quelques soutiens de marque sur la scène internationale, dont celui de la Chine et de la Russie, deux pays bien connus pour leur sens aigu de la démocratie.
Charles Blé-Goudé, le leader des jeunes patriotes, un mouvement favorable au maintien de Laurent Gbagbo au pouvoir, a lancé mercredi un ultimatum à Alassane Ouattara (qui réside à l’hôtel du Golfe d’Abidjan depuis le second tour des élections présidentielles) : quitter son camp retranché avant samedi ou subir la loi des forces armées. Qu’il n’oublie pas que l’équilibre de pseudo normalité qui s’est installé en Côte d’Ivoire est toujours extrêmement fragile, et que la situation pourrait bien devenir incontrôlable si jamais ces menaces étaient mises à exécution.