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44ème Sommet de l’OEA : une organisation en désuétude ou en recomposition ?

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Ce 4 juin s’achevait le 44ème sommet de l’Organisation des Etats Américains (OEA) à Asunción (Paraguay). Sur un continent qui connait, notamment au sud, d’importantes inégalités socio-spatiales, la lutte contre les inégalités constituait le thème principal du sommet. Une trentaine de ministre des Affaires étrangères se sont ainsi réunis afin d’évoquer les modalités d’une lutte effiace contre les inégalités, mais aussi contre les discriminations. Le secrétaire de l’OEA, le chilien José Miguel Insulza, a en ce sens insisté sur les nombreux désavantages dont souffre une partie de la population en raison de leurs origines sociales, ethniques mais aussi leur orientation sexuelle. A ces débats se sont ajoutés ceux concernant la réforme de la Commission interaméricaine des droits de l’Homme (CIDH) et la situation vénézuélienne. Face à l’appel de nombreux fonctionnaires vénézuéliens pour la mise en place de sanctions à l’égard du pays, José Miguel Insulza a insisté sur l’importance du dialogue comme outil de sortie de crise et s’est exprimé en faveur d’une solution exempte de « pressions » ou « sanctions ».

L’OEA, encore utile aujourd’hui ?

L’ensemble des déclarations met en exergue les limites des marges de manœuvre de cette organisation dont les réalisations paraissent mineures. Créée en 1948, l’OEA a pour objectif d’assurer la défense de la démocratie et des Droits de l’Homme ainsi que la sécurité du territoire (lutte contre les trafics de drogue et la corruption). Pensée initialement comme un outil de coopération, elle sert moins aujourd’hui à prendre des décisions qu’à afficher l’image d’une Amérique unie et unique à laquelle personne ne croit vraiment. Cela est lié à sa véritable fonction originelle qui était de lutter contre la pénétration du communisme sur le continent, aboutissant à l’exclusion de Cuba en 1962. De même, le faible engagement des Etats au sein de l’OEA a été illustré lors de la guerre des Malouines. Comptant sur la solidarité inter-américaine face aux puissances du Vieux Continent, l’Argentine a du faire face à la hiérarchie des alliances, plaçant l’OTAN – même sans intervention militaire directe – comme supérieure à l’OEA.

Le développement d’organisations régionales plus restreintes remet de plus en cause le fondement et les objectifs de l’OEA. Loin de s’y substituer, l’OEA parait moins ‘efficace’ et plus ‘utile’. Elle sert aujourd’hui plus de tribune et de tremplin aux puissances moyennes, à l’exemple du Canada. Ce dernier voit dans ce sommet l’occasion de rappeler l’engagement du pays en faveur de la démocratie dans une logique de renforcement de sa coopération régionale. L’objectif est principalement géoéconomique : en usant de son soft power  le Canada entend poser les bases d’un nouveau dialogue avec le sud du continent.  Dans la suite du Forum de Halifax sur la sécurité en novembre 2013, le Canada renforce son engagement en Amérique latine. Il a notamment apporté son soutien au développement et à la formation des armées guatémaltèque, chilienne, brésilienne et colombienne. Plus de 4,6 milliards de dollars ont par ailleurs été investis en aide au développement par le pays dans la région depuis 2007. Outil d’affirmation de la puissance américaine dans le cadre de la Guerre Froide, l’OEA deviendrait elle la tribune d’expression de la puissance canadienne ? Le pays semble en tout cas avoir trouvé le moyen de faire entendre, au moins régionalement sa voix, renforçant ainsi le caractère d’organisation à simple visée géopolitique, c’est-à-dire lieu rivalités pour le pouvoir sur des territoires, de l’OEA.

 

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