La « relation spéciale » mise à l’épreuve
Après une première semaine rythmée par des prises de décision critiquées, le nouveau Président des États-Unis Donald Trump a reçu la Première ministre britannique Theresa May. Elle a été la première dirigeante étrangère à être invitée à la Maison Blanche par la nouvelle administration. Ainsi, vendredi 27 janvier,les yeux du monde étaient une nouvelle fois braqués sur la Maison Blanche. L’issue de cette rencontre était attendue avec impatience, car elle devrait donner le ton pour le futur de la « relation spéciale » anglo-américaine – pour reprendre l’expression de Winston Churchill.
Le suspens lié cette entrevue a pris fin lors d’une conférence de presse qui a, d’abord, laissé penser que la « relation spéciale » allait connaître une nouvelle lune de miel. Tout a été orchestré pour convaincre les observateurs. Le tailleur de la Première ministre était assorti à la cravate du Président. Les deux dirigeants se sont brièvement tenus la main – suffisamment de temps pour que le moment soit immortalisé. Le Président Trump a assuré que les États-Unis soutiendraient « durablement cette relation des plus spéciales ». Alors que beaucoup pensaient que ces deux personnalités diamétralement opposées ne trouveraient pas de terrain d’entente, D. Trump s’est empressé d’assurer qu’ils allaient « très bien s’entendre ».
Malgré cette entente de façade, T. May n’a pas fait le dos rond face cette figure politique atypique. Elle a réaffirmé la nécessité de l’OTAN, et a même assuré que le Président américain soutenait « à 100% » l’organisation. En outre, dans un discours prononcé la veille à Philadelphie, elle a souligné que les pouvoirs européens ne devaient pas laisser Vladimir Poutine considérer l’Europe de l’Est comme sa « sphère d’influence ». Lors de la conférence de presse, D. Trump n’a pas fait l’éloge du chef d’État russe, déclarant que seul le futur dirait quelle serait sa relation avec lui.
Au-delà de ces déclarations, T. May était principalement venue pour s’assurer que le traité de libre-échange Grande-Bretagne/États-Unis promis par D. Trump était toujours d’actualité.
Cette visite représentait un enjeu considérable pour T. May. En rencontrant aussi rapidement D. Trump, elle voulait montrer aux citoyens britanniques, ainsi qu’à la classe politique, qu’une alternative à l’Union européenne existait. Alors qu’un Brexit « hard » – c’est-à-dire une sortie complète du Royaume-Uni du marché unique – se profile à l’horizon, la Première ministre mise sur la « relation spéciale ». Il est vrai que si un accord de libre-échange est signé entre les deux nations, la perte de la relation privilégiée avec l’espace économique européen, composé de plus de 500 millions de consommateurs, pourrait être compensée.
Néanmoins, ce pari risqué ressemble de plus en plus à un coup de poker. Du fait du caractère imprévisible du Président Trump, rien ne peut assurer T. May qu’il ne changera pas d’avis une fois que le Brexit sera consommé. En effet, il a mis l’accent sur « America First » lors de son discours inaugural, et il a déjà enterré le Traité Trans-Pacifique. Actuellement, rien ne laisse présager qu’il laissera de coté les politiques protectionnistes.
La Première ministre joue aussi avec sa popularité. Sa venue aux États-Unis a été critiquée par une partie de l’opinion publique, mais aussi par des figures de la classe politique. Beaucoup ne veulent pas que le Royaume-Uni s’associe avec un homme qui a largement critiqué leur pays, et qui a eu des propos racistes et misogynes. Son choix de miser sur un fort partenariat avec les États-Unis est d’autant plus critiqué depuis que le Président Trump a pris son décret sur l’immigration. Une pétition a même été lancée pour interdire une future visite d’État de D. Trump. L’alternative à l’UE proposée par T. May ne semble pas ravir l’opinion publique.