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L’AGOA : où en sont les relations Etats-Unis / Afrique ?

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En juillet 2015, le Président Barack Obama signait l’acte de renouvellement de l’African Growth and Opportunity Act (AGOA), véritable « pierre angulaire » des relations commerciales entre les Etats-Unis et le continent, ce renouvellement jusqu’en 2025 constitue un acte important en terme de multilatéralisme ainsi qu’une prise en compte des besoins de projections de long terme des investisseurs.

Forum de l’AGOA en 2014

Signée en 2000 par le président Clinton, l’AGOA fait partie du Trade and Development Act et vise à organiser et renforcer les relations commerciales entre la puissance américaine et le continent africain dans une logique répondant au principe « trade not aid » prôné par les Etats Unis à partir du début des années 2000. Elle permet à un certain nombre de produits en provenance d’Afrique subsaharienne d’être exemptés de droit de douane. Cet accord, qui concerne 39 pays, instaure des préférences commerciales conditionnées au respect de critères politiques (respect de l’Etat de droit, bonne gouvernance, droit des travailleurs, droit de l’homme) et économiques (libéralisation des échanges). Sur cette base, des pays comme la République Démocratique du Congo en 2010, le Sud-Soudan, la Gambie, le Swaziland en 2014 et le Burundi en 2015 ont été suspendus du fait de leur manquement au respect des conditions posées par l’accord.  Dans la même logique un certain nombre de pays ne sont pas éligibles (Soudan, Centrafrique, Guinée équatoriale, Érythrée, Somalie, Zimbabwe). Ainsi s’il vise à favoriser les échanges cet accord participe de la politique étrangère américaine en termes de diffusion de son modèle socio-économique.

A ce jour, il a permis l’exportation de près de 6000 produits vers le continent américain. Les échanges commerciaux entre les Etats Unis et l’Afrique subsaharienne ont doublé entre 2001 et 2014, date à laquelle ils s’élèvent à 50 milliards de dollars après un pic de 100 milliards en 2008. Cet accord assure ainsi aux Etats Unis de bénéficier de la forte croissance du continent africain (entre 3 et 5% depuis le début des années 2000). Cet accord permet également une collaboration étroite avec les pays concernés via un forum annuel ainsi que par des partenariats à l’image de l’African Women Entrepreneurship Program ( AWEP, créé en 2010).

Un accord pertinent ?

S’il permet de renforcer les liens entre continent africain et les Etats-Unis, il ne permet pas de pallier le retard des Etats-Unis par rapport aux autres partenaires commerciaux que représentent notamment la Chine et l’Union européenne. Ainsi, les échanges commerciaux entre le continent africain et la Chine en 2014 sont trois fois supérieurs à ceux entretenus avec les Etats Unis (170 milliards de dollars). La Chine, moins regardante sur les conditions politiques internes de ses partenaires économiques a su tirer profit de la croissance africaine en investissant notamment dans les infrastructures tout en profitant des potentialités du continent en termes d’approvisionnement et de débouchés. En ce sens, l’AGOA se limite à un accord de libre-échange visant à compenser le recul de l’aide au développement en accordant une plus grande place à l’échange économique. Cet accord semble ainsi hésiter entre une logique de soutien au développement économique et une stratégie géopolitique de positionnement sur un continent à forte croissance. Par ailleurs, nombre des exemptions permises par l’AGOA sont également comprises dans le système généralisé de préférences de la CNUCED en faveur des pays en développement et moins avancés.

En outre, cet accord tend à favoriser les pays les plus développés et les plus insérés dans la mondialisation du contient : le Nigéria, l’Angola et l’Afrique du sud représentent à eux trois 80% des exportations vers les Etats Unis. De même l’essentiel des exportations américaines se font vers ces pays ainsi que l’Ethiopie et le Togo. Ainsi nombre de pays ne bénéficient pas pleinement de cet accord, et ne peuvent faire valoir leurs revendications. Côté américain, des voix s’élèvent également pour dénoncer un accord dépourvu de  réciprocité dans la mesure où les concessions faites à l’Afrique ne sont pas doublés d’accès aux marchés africains, contrairement aux autres partenaires du continent. Cet accord participe du déficit commercial américain vis-à-vis de l’Afrique, il s’élevait en 2013 à environ 5 milliards de dollars. Ainsi, le changement de pouvoir américain ouvre une période d’incertitudes. Si le renouvellement de l’accord en 2015 répondait aux exigences des pays africains d’avoir un cadre de long terme favorisant les investissements, l’arrivée à la Maison Blanche d’un président favorisant le protectionnisme au détriment des grands accords de libre-échange et dont la politique africaine semble inexistante, risque de remettre en cause l’existence et la pertinence de l’AGOA.

 

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