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Union eurasienne : démarrage difficile pour le rêve de grandeur de Poutine

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Le projet est lancé. Jeudi 29 mai à Astana, la Russie, la Biélorussie et le Kazakhstan ont signé la création de l’Union économique eurasienne (UEE). Le projet, porté à bout de bras par Vladimir Poutine depuis 2010, est censé à terme concurrencer l’Union Européenne. Pourquoi cet objectif est très loin d’être à portée ?

Vladimir Poutine l’a compris : dans un monde qui se construit en blocs, il est nécessaire à la Russie de réintégrer dans son giron les anciennes républiques vassales de l’URSS. Et c’est par une intégration économique qu’elle entend faire contrepoids à l’Union Européenne et à la Chine, tout en gardant à l’œil les Etats-Unis. L’objectif est ambitieux et avec 20% des réserves mondiales de gaz naturel et 15% des réserves mondiales pétrolières, la Russie et le Kazakhstan possèdent des atouts énergétiques certains. Cette union économique ne serait qu’un premier pas : Moscou veut aller plus loin avec, à terme, une monnaie, une politique étrangère et une citoyenneté commune. Le fait que le Kirghizistan ou encore l’Arménie soient susceptibles de rejoindre les trois signataires d’ici au 1er janvier 2015 montre que la Russie est encore capable d’unir autour de sa position.

Mais tout reste encore à faire. Aujourd’hui cette union économique de 170 millions d’habitants pèse, en termes de PIB, moins que la France ou que le Royaume-Uni et les perspectives de développement économique au sein de cet ensemble restent limitées. En effet, cette zone de libre-échange se révélera être très, voir trop, homogène : les trois pays signataires ont une économie quasi-exclusivement basée sur l’industrie des matières premières. Ils sont minés par une corruption endémique, un manque d’investissement criant renforcé par les sanctions occidentales contre la Russie après les récents événements en Ukraine, et ils sont marqués par une forte instabilité monétaire. De plus, contrariant les intentions d’intégration politique de Poutine, le président kazakh Nazarbaïev a souligné l’aspect uniquement commercial de l’union et a vidé l’accord de toute allusion à un transfert de souveraineté à Moscou.

Bien évidemment un pays est dans toutes les têtes : l’Ukraine aurait dû être le point fort de cette union, son argument européen et industriel.

Or si Poutine avait tout prévu pour l’intégration de l’Ukraine à cet accord, comme le fait de placer Ianoukovitch au pouvoir à Kiev, les événements de Maïdan ont fait échouer l’opération. En plus d’éclipser la gloire de la Russie à Sotchi, Maïdan a contribué à l’élection d’un président pro-européen à Kiev qui a prévu son intégration à l’UE. Il faut dire que cette union eurasienne sera surtout un atout pour la Russie : un atout démographique d’abord, et un atout géopolitique contre l’Europe et les Etats-Unis. Cette signature le 29 mai est aussi un message politique de Poutine signifiant sa défiance des sanctions occidentales et sa mainmise sur la région. Il n’en demeure pas moins que, malgré les annonces de Moscou, cette union fait surtout des sceptiques, même parmi ses membres : un politologue kazakh l’a bien résumé en disant que son pays ne savait pas s’il avait acheté un billet pour le Titanic ou l’Arche de Noé.

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