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Accord Union Européenne Turquie : pourquoi tout le monde est content alors que rien n’a avancé.

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L’accord signé entre l’Union Européenne et la Turquie ce dimanche a été en particulier salué par le premier ministre turc Ahmet Davutoglu comme un « jour historique » et « le début d’un nouveau processus ». Donald Tusk, président du Conseil Européen s’est aussi félicité de l’accord même s’il n’a rien promis de très concret. Pourquoi tout le monde semble si heureux alors que l’accord en question reste bien flou ?

Le premier ministre turc Ahmet Davutoglu et le président du Conseil Européen Donald Tusk au sommet ce dimanche.
Le premier ministre turc Ahmet Davutoglu et le président du Conseil Européen Donald Tusk au sommet ce dimanche.

Ankara demandait trois milliards d’euros par an pour fixer les réfugiés syriens sur son sol, estimant que l’accueil des réfugiés lui a coûté sept milliards d’euros au total. Elle a aussi demandé une accélération des négociations pour faciliter l’attribution de visas à ses citoyens à destination de l’Europe. Enfin, le gouvernement Erdogan demandait la relance du processus d’adhésion à l’Union Européenne. Pour ce qui est de la première disposition, la principale, Donald Tusk a promis la création du fond de ce montant mais Jean-Claude Junker, président de la Commission européenne, a aussi promis d’en contrôler très précisément l’utilisation notamment en ne versant pas la somme au gouvernement turc mais en distribuant les moyens en fonction des projets. La demande au sujet des visas semble être possible mais celle de la relance des négociations d’adhésion à l’Union a encore moins de chance d’aboutir qu’en 2005 au vu des dérives autoritaires du pouvoir actuel.

Mais dans le fond tout le monde a obtenu ce qu’il voulait : l’Allemagne a obtenu une promesse que l’afflux de migrants serait contrôlé par la Turquie, et ce sans avoir à lever le ton et donc éventuellement fâcher une partie de la communauté turque d’Allemagne. Les pays d’Europe de l’Est sont heureux que le problème soit géré hors des frontières de l’Union, ce qui explique pourquoi ces fonds ne sont pas destinés à la Grèce. Le gouvernement turc peut, quant à lui, présenter un accord réussi avec l’Europe alors qu’il est de plus en plus isolé sur la scène internationale après la révélation de son soutien direct à Daesh et qu’il s’est aliéné la Russie en abattant un sukhoi le 24 novembre dernier. La demande turque au sujet des visas est aussi une demande ancienne qui a peut-être des chances d’aboutir.

Mais personne n’est dupe d’un accord a minima dont même les trois milliards d’euros promis par l’Union sont loin d’être acquis.

A ce jour même la Commission européenne n’a débloqué que 500 millions et de nombreux autres pays attendent qu’elle s’engage plus. Quant à savoir si cette aide sera annuelle, ce serait formuler beaucoup d’espoirs. Dans le fond la Turquie recevra de l’argent pour gérer une situation qui se déroule déjà sur son sol et une amélioration drastique de la perméabilité de la frontière turque en cas de versement de la somme pourrait laisser à penser que la Turquie a joué une sorte de chantage. On ne devrait donc pas voir la situation changer très rapidement après l’accord même si les européens sont heureux de voir le centre de gravité du problème sortir de leur territoire. La Turquie a gagné une image de négociation réussie et d’entente à un moment où elle est isolée et sous le feu des projecteurs, de plus trois milliards d’euros potentiels chaque année devraient plaire à la population pour gérer un problème auquel ils font face de toutes manières.

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