Euro 2016, entre soft power et sécurité (2/2)
Mercredi 25 mai 2016, l’Institut de Relations Internationales et Stratégiques (IRIS) organisait une conférence intitulée : « Euro 2016 : les défis pour l’image et la sécurité ». La France a le privilège d’accueillir l’Euro de football, le 3ème événement le plus médiatisé au monde, après les Jeux Olympiques et la Coupe du Monde de football. La compétition se déroulera du 10 juin au 10 juillet 2016. Dans une première partie, nous avons vu comment la France souhaite augmenter son soft power grâce à l’Euro. Abordons maintenant l’immense défi de la sécurité.
Rappelons d’emblée que c’est la 3ème fois que la France organise l’Euro, après les éditions de 1960 et de 1984. Pour l’Euro 2016, les autorités françaises ont déposé leur candidature en 2009 qui a été retenue en 2010. Cela fait donc 6 ans que la France prépare cet événement exceptionnel. Le défi est immense car, pour l’édition 2016, il s’agit véritablement d’un mini mondial : le nombre d’équipes en lice est passé de 16 à 24 pour qu’il y ait des 8e de finale. La couverture médiatique sera exceptionnelle pour les 51 matchs prévus.
La France s’est dotée de la Division nationale de lutte contre le hooliganisme (créée en octobre 2009). Depuis, la législation a été durcie notamment avec la loi sur les bandes en 2010 ainsi qu’une loi plus récente pour renforcer le dialogue entre les supporters et le personnel en charge de mener la lutte contre le hooliganisme. De plus, un point national d’information football existe depuis 2002. Il favorise l’acquisition de renseignement et facilite le partage d’informations avec les structures équivalentes à l’étranger afin d’accompagner les déplacements de supporters. En France, le commissaire de police Boutonnet est à la fois le chef du point national d’information football et le chef de la Division nationale de lutte contre le hooliganisme. Cette division travaille depuis plus de 3 ans sur l’Euro. Elle a réalisé un benchmark de ce qui se fait de mieux en matière de sécurité des grands événements sportifs à l’étranger. Globalement, l’ensemble du dispositif de sécurité de l’Euro 2016 est le fruit d’un travail de groupe avec les sociétés de sécurité privées, le comité organisateur de l’Euro 2016, les ministères et la FFF.
Comment fonctionne le dispositif de sécurité de l’Euro 2016 ?
Actuellement en France, le contexte sécuritaire et social est difficile. Grâce au réseau des points nationaux d’information football, les autorités françaises ont pris connaissance des itinéraires des supporters, de leur niveau de dangerosité ainsi que des lieux d’hébergement et de séjour. Des policiers étrangers sont mobilisés pour accompagner les supporters des équipes étrangères, des physionomistes appelés « spotters » dont certains en civil seront positionnés dans les stades pour surveiller les supporters qui présenteraient un risque. Certains seront retenus dans leur pays d’origine grâce au renforcement du contrôle des voies d’accès (ferrées, routières, aériennes) et du travail de la police aux frontières (RailPol, …).
Le centre de coopération policière internationale constitue le centre névralgique du dispositif de sécurité pour l’Euro 2016. Il établit une grille d’analyse de risques (échelle de 1 à 4) pour chaque match. Les mesures administratives d’anticipation des risques ont permis de baisser le risque. Aucun match n’est classé niveau 4 et seulement 5 matchs sont classés niveau 3. Les critères de risques tiennent compte d’une banque de données de sécurité référencée à chaque match. En outre, les autorités tiennent compte du nombre de supporters, de leur concentration géographique et de l’évolution (géo)politique des États qui peut avoir une influence sur l’attitude des supporters. C’était le cas lors d’affrontements entre supporters polonais et russes à l’Euro 2012. Concernant l’édition 2016, les efforts de sécurité seront concentrés sur les supporters anglais notamment dans le cadre du match Angleterre-Pays de Galles. Plus généralement, les personnes interdites de stade dans leur pays d’origine ne pourront pas accéder au territoire français. Notons qu’habituellement, lors des grandes compétitions sportives, le public est majoritairement familial, contrairement au public des championnats nationaux qui ont leurs ultras.
Enfin, des « fan zones » seront établis dans les grandes villes organisatrices de l’Euro 2016. Il s’agit d’une extension de la compétition pour accueillir un large public qui n’a pas obtenu de billet pour accéder aux stades. Ces « fan zones » seront des lieux de retransmission publique avec écrans géants et animations. Elles seront fermées et sécurisées avec palpations/fouilles, contribution de sociétés de sécurité privées et vidéosurveillance. Même des drones de surveillance seront déployés durant l’Euro pour assurer la sécurité de tous.