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La Luftwaffe à la recherche d’un remplaçant pour ses Tornados

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Dire que la Bundeswehr, l’armée allemande, n’est pas en très grande forme relève sans doute de la litote. Les révélations à propos des dysfonctionnements du matériel militaire allemand ont émaillé l’actualité au cours des derniers mois. La Luftwaffe se retrouve maintenant face à un nouveau problème : elle doit remplacer d’ici 2025 ses 85 chasseurs Tornado devenus obsolètes. Les industries aéronautiques européenne et américaine sont sur les rails pour emporter cet important contrat. Or, au-delà des considérations purement techniques, la décision allemande sera lourde de conséquences politiques.

Panavia Tornado de la Luftwaffe, chasseur en sursis

Mis en service en 1983, les chasseurs Tornado de la Luftwaffe, produits par un consortium européen au sein duquel l’industrie allemande occupe une place centrale, sont en fin de vie. Pour les remplacer, Berlin a le choix entre le successeur européen du Tornado, l’Eurofighter, et trois modèles américains, les F-35, F-18 et F-15E. Or ces avions sont supposés faire partie de la force de dissuasion nucléaire commune entretenue par l’OTAN. De ce point de vue, les chasseurs américains semblent plus appropriés, puisque les F-15 et F-18 sont déjà certifiés par l’armée américaine pour transporter des têtes nucléaires, tandis que le F-35 devrait l’être d’ici 2022. Ce dernier présente également l’avantage d’être le seul chasseur de cinquième génération disponible, ce qui renforcerait considérablement la crédibilité de la dissuasion nucléaire nord-atlantique. Toutefois, Airbus, qui est le principal industriel européen impliqué dans la construction de l’Eurofighter, argue du fait que ce dernier est déjà au centre du dispositif de la Luftwaffe, ce qui simplifierait la situation à l’heure où les Européens sont critiqués pour la multiplicité de leur armement.

Une problématique éminemment politique

La question est néanmoins avant tout politique. Pour les États-Unis, il s’agit de mettre en avant leur industrie aéronautique, au premier rang de laquelle se trouve Lockheed Martin. Alors que Donald Trump engage la première puissance mondiale dans une guerre commerciale, cette question peut apparaître comme un pendant à la critique de l’excédent commercial allemand vis-à-vis des États-Unis. Washington pourrait ainsi tenter d’obtenir le contrat en échange d’une plus grande souplesse à l’égard de l’industrie automobile allemande, régulièrement attaquée par l’administration Trump. De son côté, la chancelière Merkel pourrait vouloir opter pour l’apaisement face à un partenaire américain de plus en plus virulent au sujet des dépenses militaires allemandes (1,24% du PIB aujourd’hui, avec un objectif à 2% en 2025 impossible à atteindre). Si Donald Trump a in fine  réaffirmé l’engagement américain dans l’OTAN au sommet de Bruxelles, il y a quelques jours, il pourrait toutefois poursuivre le mouvement de désengagement de l’US Army en Allemagne engagé par son prédécesseur.

L’avenir de l’Europe de la défense pourrait se jouer sur cette question

L’Allemagne devra cependant choisir entre apaiser un dirigeant américain velléitaire et soutenir une industrie militaire européenne fragilisée. En effet, si le choix de l’Allemagne se portait sur des chasseurs américains, les Européens, en l’absence de commande substantielle, y perdraient certainement en expertise industrielle. C’est donc à la fois l’avenir d’une industrie clé en termes de savoir-faire et d’indépendance stratégique qui est en jeu. La France ne s’y est d’ailleurs pas trompée. Elle a fait comprendre à sa voisine qu’un choix non-européen pourrait signer la fin du projet franco-allemand de chasseur de cinquième génération. A l’heure où l’Union européenne tente de se relancer, notamment par l’Europe de la défense, et, spécifiquement, des programmes d’armement au sein de la Coopération Structurée Permanente (CSP ou Pesco), négliger l’option européenne pourrait avoir des effets délétères sur une construction européenne en mal de vision. Entre les menaces américaines et les sirènes européennes, le gouvernement allemand semble, pour l’instant, privilégier les secondes. Il devra pour cela, toutefois, surmonter les réserves de la Luftwaffe et les tweets de Donald Trump.

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