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Paris et Londres annoncent une coopération militaire : pétard mouillé ou grand pas en avant ?

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« L’armée britannique aux ordres de la France », telle est la vision d’apocalypse qu’a pu donner aux britanniques le tabloïd anglais Daily Express à propos de l’accord signé mardi, à Londres, par Nicolas Sarkozy et David Cameron : deux traités de coopération dans le secteur de la défense et de la sécurité. Les tabloïds se déchaînent contre cette idée, annonçant la perte de leur indépendance aux profits de « poltrons » de français. Qu’en est-il exactement ?

Douze ans après le sommet de Saint-Malo, où les deux pays s’étaient déjà promis de renforcer leur partenariat militaire, le projet est d’abord de créer des « champions européens » de l’industrie militaire. Ceci, afin de concurrencer les États-Unis et de partager le coût de développement de nouvelles armes. En matière d’ armement nucléaire, Nicolas Sarkozy et David Cameron ont signé un traité qui permettra aux deux pays, signataires du traité d’interdiction des essais nucléaires, de simuler à partir de 2014 le fonctionnement de leur arsenal atomique dans un même laboratoire, implanté près de Dijon, en Bourgogne. En parallèle, un centre de recherche sera ouvert en Grande-Bretagne, à Aldermaston, aux spécialistes des deux pays. Des programmes de recherche communs pour les drones de surveillance MALE (Moyenne Altitude Longue Endurance) prévus entre 2015 et 2020, et en 2012 un « programme commun de démonstrateur » destiné à préparer les futurs « drones de combat » sont aussi au programme.

Au sujet des déploiement de leurs forces, la Grande-Bretagne devrait se doter d’un porte-avions d’ici 2020. Les deux pays signeront par ailleurs en 2011 un contrat unique d’entretien et de maintenance pour leur flotte d’avions de transport militaire A400M et veulent former leurs pilotes ensemble. Ils partageront enfin leurs flottes de ravitailleurs en vol. Une « force expéditionnaire conjointe » de plusieurs milliers d’hommes sera créée vers 2011, qui sera mobilisable pour des opérations extérieures bilatérales ou sous drapeaux de l’OTAN, de l’ONU ou de l’Union Européenne. Cependant, elle ne devrait pas concurrencer la brigade franco-allemande comptant environ 5100 hommes, car elle ne sera que de circonstance, et ne disposera pas de bâtiment ni de centres de formations spécifiques. Les deux nations devraient donc conserver leurs souverainetés, comme l’ont lourdement rappelé N. Sarkozy et D. Cameron.

Concernant la pérennité de ce projet, rien n’est assuré : Les plus cyniques, à Paris, selon Sabine Syfuss-Arnaud, éditorialiste à Challenges, font remarquer que ce n’est que la crise économique, qui dévaste actuellement les finances britanniques, qui pousse les anglais à accepter ce rapprochement. Les griefs entre l’Angleterre et la France restent importants. Culturellement d’abord : « l’hostilité envers les Français fait le tissu de nos vies depuis mille ans » surenchérit le Daily Express. Sur l’engagement en Irak ensuite (d’où l’accusation de « poltron »), sur l’idée de défense européenne forte enfin : un projet que la Grande-Bretagne a toujours empêché. Mais qui serait en train de naître malgré elle ?

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