Migrations et asile en Europe : un nouveau pacte pour de nouvelles perspectives ?
Les incendies des camps de Mória en Grèce et de Lipa en Bosnie-Herzégovine marquèrent tristement la fin d’année 2020. Ces deux événements mettent en lumière les lacunes de la politique migratoire actuelle de l’Union Européenne. Néanmoins, malgré les critiques de ses plus féroces opposants, Bruxelles tente d’apporter une nouvelle réponse à cette crise. Tel est l’objectif du nouveau pacte relatif à la gestion de l’asile et de la migration qui doit être voté au deuxième semestre 2021.
Un nouveau pacte audacieux
Se voulant en rupture avec le système Dublin, ce nouveau pacte a pour objectif l’approfondissement de la solidarité entre les États membres. Elle prévoit aussi l’accélération des procédures à la frontière et une meilleure procédure en matière de retours et de réadmission.
Il s’accompagne de la mise en place d’un système de sponsorship. Les États refusant d’accueillir des migrants sur leur territoire national pourront prendre en charge leur retour jusqu’à leur pays d’origine. En d’autres termes, les États sponsors auront la responsabilité du retour d’un migrant dont la demande d’asile n’aura pas été acceptée dans l’État membre dans lequel il a fait sa demande. Ces même États pourront également soutenir logistiquement les pays de l’Union les plus exposés, comme l’Espagne, l’Italie ou la Grèce. Ce, en leur apportant une aide matérielle ou leur expertise.
Le nouveau pacte sur la migration et l’asile veillera à renforcer les réseaux migratoires existants. La commission encouragera par exemple les migrants à déposer leur demande d’asile dans un État membre qui leur a déjà accordé un titre de séjour. Elle conditionnera également la délivrance de visas aux ressortissants de pays tiers. La coopération avec ces États sera renforcée pour assurer une possible réadmission.
De plus, dans les faits, un tiers des personnes ayant reçu l’ordre de quitter l’espace Schengen le quitte réellement. La refonte du système de retour est ainsi au coeur des nouveautés proposées par le pacte. La commission cherche également à renforcer le rôle de Frontex. Effectivement, le pacte prévoit l’élargissement du champ de compétences de l’agence via des accords avec les pays des Balkans occidentaux.
Une collaboration accrue avec les pays tiers
Un aspect essentiel du nouveau pacte sur la migration et l’asile est la signature de partenariats avec les pays tiers. Ce, à tous les niveaux (bilatéral, régional et multilatéral). Ces partenariats concerneront par exemple la coopération policière, la mise en place de normes juridiques communes ou la formation des polices locales (à l’image du partenariat signé en 2018 avec le Maroc).
La Commission assure que les futures aides au développement seront conditionnées aux politiques migratoires des États demandeurs de ces aides. Un autre élément pris en compte sera l’engagement des pays tiers dans la lutte contre le trafic de migrants.
Le nouveau pacte devrait également poursuivre la politique de financement consacrée aux réfugiés et aux migrations en dehors de l’Union. Depuis 2015, Bruxelles a alloué plus de 9 milliards d’euros (soit 10% du budget alloué aux relations de voisinnage) à la coopération pour le développement international.
Toutefois, cette collaboration reste grandement dépendante des Etats tiers. En effet, ces États sont les seuls à pouvoir délivrer les laissez-passer nécessaire au transfert de leurs ressortissants.
L’espace Schengen au coeur du nouveau pacte sur la migration et l’asile
Il faut préciser que le nouveau pacte sur la migration et l’asile reste lié aux problématiques relatives à l’espace Schengen. Bruxelles cherche ainsi à moderniser le système d’information Schengen (SIS) afin de le rendre plus efficace.
La mise à jour d’Eurodac d’ici 2023 est également une composante essentielle du nouveau pacte. La modernisation de la base de données commune pour l’asile et la migration pourra permettre de suivre avec plus de précision les mouvements non autorisés. Elle assurera également une meilleure lutte contre l’immigration irrégulière au sein de l’espace Schengen.
Néanmoins, en matière de politique migratoire et notamment sur la question des retours, l’Union reste très dépendante des États tiers. Tout l’enjeu pour l’administration Von der Leyen sera de parvenir à articuler une meilleure coopération avec ces pays en matière de réadmission ainsi qu’un renforcement de la solidarité intra-européenne.