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Construction du gazoduc EastMed : accord israélo-chypriote-grec

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Les dirigeants des trois pays sont parvenus à un accord le 20 décembre dernier à Beer-Sheva en Israël pour la construction du gazoduc EastMed. Il devra acheminer, à l’horizon 2025, les milliards de mètres cube de gaz découverts ces dernières années au large de Chypre et d’Israël, vers le marché européen.

Le plus long gazoduc sous-marin du monde

Plateforme de forage au large des côtes israéliennes

Le gazoduc EastMed devrait s’étirer sur plus de 2000 km du large de Chypre jusqu’aux côtes italiennes, en passant par la Grèce. Ce projet relève du défi technique : plus long gazoduc sous-marin du monde, certains de ces tronçons s’enfonceront à plus de 3000 mètres, dans une zone qui plus est soumise aux séismes. D’où son montant conséquent, estimé entre 5,8 et 6,2 milliards d’euros qui, une fois les financements trouvés, permettra d’acheminer environ 20 milliards de m3 de gaz (Gm3) pour un début des travaux prévu à l’horizon 2025. Par ailleurs, la perspective d’un gazoduc s’est accompagnée d’un réchauffement des relations de l’état hébreu avec ses deux voisins, se traduisant par des accords de coopération économique, mais également par des exercices militaires communs. Les scénarios envisagés – comme l’attaque d’une plateforme offshore – rappellent que si les récentes découvertes gazières peuvent être facteurs de coopération en Méditerranée orientale, elles peuvent également aggraver les tensions existantes. De fait, le projet rencontre l’opposition de la Turquie qui l’associe à la question chypriote, autant qu’elle cherche à contrecarrer les ambitions israéliennes dans la région, en réponse aux tensions autour de la question palestienne et en particulier à l‘incident du Mavi-Marmara en 2009.

Exporter le gaz de Méditerranée orientale : quelles routes prendre ?

Trois pays se sont lancés dans l’exploitation des ressources gazières du bassin levantin, estimées à plus de 3500 Gm3 par un rapport américain, soit près de dix fois les quantités déjà découvertes. Israël a été le premier à débuter  ses prospections dans les années 2000, qui ont abouti à la découverte de deux grands champs gaziers : Tamar en 2009 et Leviathan en 2010, avec des réserves respectivement estimées à 300 et 620 Gm3. Gage de sécurité énergique, l’exploitation de ces champs implique pour Israël, une capacité d’exportation importante face à un marché domestique beaucoup trop restreint. Un temps envisagée, la solution de liquéfier ce gaz a été abandonnée, du fait des coûts d’investissements colossaux et de la trop grande vulnérabilité à une attaque terroriste. La construction d’un gazoduc entre Israël et la Turquie, option estimée comme moitié moins chère que le EastMed, a également achoppé du fait des tensions politiques évoquées précédemment. De son côté, l’Egypte n’est pas en reste puisqu’en 2015 la compagnie ENI a découvert le champ gazier nommé Zhor, qui renfermerait 850 Gm3. Ce dernier permettra de répondre aux besoins considérables et immédiats du marché domestique égyptien, avant d’envisager une politique d’exportation. Le dernier de ces pays pouvant espérer tirer des bénéfices de ces extractions, dans des proportions  toutefois plus modestes, est Chypre. L’exploitation de son champ gazier Aphrodite (200 Gm3) est particulièrement intéressante alors que l’Union Européenne (UE) mène une politique de diversification de ses fournisseurs et de ses routes d’approvisionnement.

Gazoduc EastMed  : quelle contribution à la politique européenne de diversification des fournisseurs ?

Le projet de construction s’insère, en effet, dans la politique de diversification des fournisseurs énergétiques de l’UE , alors que près de la moitié du gaz consommé en Europe provient encore de Russie. Le projet a donc obtenu le soutien de la Commission européenne, qui l’a inscrit sur la liste des projets d’intérêt commun, condition préalable pour obtenir un cofinancement. Malgré tout l’intérêt que l’UE lui porte, le gazoduc EastMed ne jouera cependant – du fait de son débit modeste – qu’un rôle mineur dans la diversification des fournisseurs énergétiques, surtout quand l’on sait que la Russie propose simultanément la construction de deux gazoducs, Turkish Stream ( 32 Gm3), en mer noire, et Nord Stream II (55 Gm3), en mer baltique. Pour le premier, la partie maritime a déjà été finalisée en novembre dernier, et les travaux ont commencé pour le reste du tronçon, avec un début de livraison de gaz prévu dès 2020 ; pour le second, dont la construction a également débuté, il doublera les capacités du Nord Stream I, soit 110 Gm3 au total.

Le projet de gazoduc EastMed ne représentera pas un bouleversement, du fait de son débit modeste, dans la diversification des fournisseurs énergétiques européens. Toutefois, pour les pays promoteurs du projet, il s’impose comme l’unique moyen de transformer les récentes découvertes gazières en Méditerranée orientale en manne financière. Dans une région soumise aux forts intérêts géopolitiques, ces découvertes risquent de raviver autant que de créer d’importants foyers de tension.

Sources :

https://besacenter.org/wp-content/uploads/2017/06/505-Eastmed-Tzogopoulos-final.pdf

https://www.ifri.org/sites/default/files/atoms/files/note_gaz_israel_boncourt.pdf

https://abonnes.lemonde.fr/economie/article/2014/12/02/gazoduc-south-stream-pourquoi-la-russie-a-decide-de-jeter-l-eponge_4532731_3234.html?

https://www.oxfordenergy.org/wpcms/wp-content/uploads/2013/10/OEF-93.pdf

https://www.researchgate.net/publication/310615735_The_role_of_energy_as_a_geopolitical_factor_for_the_consolidation_of_Greek-Israeli_relations

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