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L’Europe bismarckienne (1871–1890), ou la paix par l’équilibre des puissances

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Otto Eduard Leopold von Bismarck-Schönhausen, premier chancelier fédéral de l’Allemagne de 1871 à 1890

En plein décollage industriel et unie après la victoire contre la France (1871), l’Allemagne a imposé vingt ans durant une certaine domination sur l’Europe. C’est l’œuvre du chancelier prince Otto Von Bismarck qui, par une habile diplomatie, instaure un ordre international favorable à l’Empire allemand.

Bismarck est avant tout un homme d’ancien régime qui entend préserver la « légitimité dynastique » de part l’Europe. A ce titre, il va sur toute la période être un farouche adversaire des idées révolutionnaires et des mouvements d’émancipation des minorités. Il constitue ainsi en 1872 autour de l’Allemagne un « bloc conservateur » incarné par l’Entente des trois empereurs (Allemagne, Autriche, Russie) et lié par la question polonaise (ces trois pays sont les bénéficiaires du découpage de la Pologne issu du traité de Vienne de 1815).

Pendant vingt ans, le chancelier allemand va œuvrer pour maintenir une paix relative en Europe dans l’intérêt de l’Allemagne. Pour cela, il va tacher de préserver l’équilibre des puissances par le maintien du statu quo territorial, s’assurant qu’aucune puissance européenne ne soit en mesure de prendre un avantage décisif sur les autres. Ainsi, après la victoire russe sur l’Empire ottoman (1877), l’Allemagne pèse de tout son poids pour éviter une domination russe sur les Balkans. Le traité de Berlin, négocié sous la présidence du « chancelier de fer », est un chef d’œuvre de compromis : l’indépendance de la Roumanie et de la Serbie, frères slaves de la Russie, sont proclamées ; l’Autriche-Hongrie occupe la Bosnie ; le Royaume Uni obtient Chypre ; la France obtient des droits sur la Tunisie et l’Italie sur la Tripolitaine (actuelle Lybie). Par ces multiples concessions, Bismarck obtient le soutien des dirigeants européens en garantissant l’équilibre des forces : tout le monde gagne (excepté l’Empire Ottoman…) mais personne n’obtient un avantage décisif.

Le troisième axe de la diplomatie bismarckienne est l’isolement de la France. Le chancelier avait conscience que le revanchisme français né de l’annexion de l’Alsace-Lorraine aboutirait un jour ou l’autre à une nouvelle guerre. C’est pourquoi il s’est ingénié à reproduire sa stratégie de 1870 : s’assurer qu’en cas de guerre, la France ne puisse compter sur aucun allié. C’est dans cette optique qu’il conçoit en 1882 la Triplice. Cette alliance défensive réunie autour de l’Allemagne l’Empire Austro-hongrois (Bismarck ayant travaillé à « faire oublier » à la monarchie habsbourgeoise sa défaite à Sadowa en 1866 contre l’Allemagne) et l’Italie (dont les ambitions tunisiennes ont été anéanties par l’intervention française de 1881). Pour parachever son œuvre, Bismarck entretient de bonnes relations avec la Grande Bretagne (il appuie la cession de Chypre à la couronne britannique) et signe avec la Russie le traité secret de « contre-assurance » (soutien de l’Allemagne à la Russie sur la question des détroits contre garantie a minima d’une neutralité bienveillante contre la France en cas de guerre).

Cet ordre bismarckien n’a cependant pas survécu à la démission du chancelier. Fondé sur le secret et sur l’équilibre des puissances, les impérialismes du début du XXe siècle ont eu raison de lui.

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