Qu’est-ce que l’inflation ?
L’inflation est un déséquilibre qui correspond à une perte de pouvoir d’achat de la monnaie, et qui se manifeste par une hausse générale, auto-entretenue et cumulative des prix.
On distingue différents types d’inflations selon leurs causes : l’inflation par la demande (« l’inflation est une demande sans offre », Rueff) lors de situations de pénurie (après-guerre) ou des phases d’expansion du cycle (surchauffe) ; par les coûts (matières premières, importations, coûts salariaux) lorsque ceux-ci augmentent plus rapidement que les prix ; et l’inflation monétaire lorsque la croissance de la masse monétaire excède celle de la production.
L’inflation a pour principale conséquence de rendre chaque chose plus chère demain. De cela découlent des effets sur l’endettement (l’effet levier incite les agents à s’endetter), sur l’investissement (la valeur réelle des encaisses diminue) et sur la consommation (achat aujourd’hui de ce qui sera plus cher demain). Mais l’inflation, source d’incertitudes, rend surtout les prix relatifs instables, perturbant les décisions économiques. De plus, elle redistribue les revenus et les patrimoines, en dévalorisant les dettes passées, mais aussi l’épargne non protégée et les revenus non indexés. Au niveau international, enfin, elle rogne le pouvoir d’achat de la monnaie. L’inflation, donc, tend à déprimer l’activité.
Pire, en jouant sur les esprits des agents économiques, qui l’anticipent, l’inflation se rend elle-même plus difficile à combattre. Ainsi, depuis la fin des années 70, elle s’est imposée comme le mal absolu que les politiques économiques doivent combattre, bien que l’abandon de la référence métallique dans la définition de la monnaie permette de ne plus sacrifier la croissance au dogme de la stabilité monétaire. Pourtant, nombreuses sont les zones monétaires qui se « lient elles-mêmes les mains » (Barro), comme l’Union Européenne qui s’impose une cible d’inflation à 2%.
Néanmoins, l’inflation pourrait s’avérer être un mal nécessaire. « Mieux vaut l’inflation que le chômage » disait Pompidou, acceptant la contrainte de l’inflation pour garantir le plein emploi (courbe de Phillips). Mais l’illusion des agents ne durant qu’un temps, le laxisme monétaire ne fait que retarder l’échéance des ajustements, ce qui entraîne bientôt la stagflation. Depuis, le dogme anti-inflationniste s’est imposé, à coup de monétaristes (Reagan et Volcker) et de désinflation compétitive (Trichet), pour casser les anticipations inflationnistes des agents.
Pourtant, si l’inflation est nocive, la déflation est un péril encore plus grand, puisqu’elle repousse la consommation, déprime l’activité et alourdit le poids des dettes par rapport au revenu. Si l’inflation peut être créatrice (Albert Meister), la déflation est toujours destructrice, et c’est bien cette dernière qui menace de frapper aujourd’hui.
Si l’inflation n’a pas toujours été considérée comme un obstacle à la croissance, les marques laissées par l’hyperinflation allemande ou les déséquilibres plus récents interdisent désormais tout dérapage des prix. Pourtant, l’accélération de l’inflation accompagne naturellement le cycle, et l’on peut craindre que la cible d’inflation, trop rigide, freine prématurément la croissance. C’est donc le caractère systématique de la politique monétaire qui est aujourd’hui en question. Il existe un niveau intermédiaire entre laxisme et dogme qui permettrait peut-être aux pays de retrouver la croissance et de rembourser leurs dettes.