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La région du Sinaï, retour sur les origines des troubles

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Le Sinaï, une région au coeur du conflit Israélo-palestinien et du combat des soldats de l'EI pour le califat islamique
Le Sinaï, une région au coeur du conflit Israélo-palestinien et des conflits liés aux terroristes de l’EI

Le Sinaï est une région très instable notamment à cause de la démilitarisation imposée par le traité israélo-égyptien de 1978. La région qui voit s’affronter de nombreux groupes d’intérêts (Armée égyptienne, Bédouins, groupes islamistes, Israël et le Hamas) a vu le nombre d’actions terroristes augmenter une première fois en 2004 puis en 2011 lors du Printemps Arabe et enfin en 2013 à la chute de Mohamed Morsi.

La péninsule fut occupée par Israël suite à la guerre des Six-Jours puis rétrocédée à l’Égypte après les accords de Camp David de 1978. Dans les années 1980, le chef de l’État égyptien Hosni Moubarak lance le développement du sud de la péninsule avec l’ambition d’en faire une destination touristique de premier choix. Mais les populations locales, principalement bédouines ne profiteront pas des retombées économiques car interdites de s’engager dans l’armée, l’administration ou dans certains des emplois liés au tourisme. La population bédouine qui contrôle l’intérieur des terres va se tourner alors, en partie, vers la contrebande. Elle gardera une grande rancune envers le gouvernement du Caire.

Des bédouins qui vont mener une insurrection contre le pouvoir central à partir de 2011

Les bédouins n’étaient toutefois pas des alliés des islamistes qui se positionnaient contre toutes sortes de trafics qui n’étaient pas en accord avec leur ligne dure islamiste (cigarettes, drogues …). Mais l’amalgame est souvent fait à cause de l’implication des bédouins dans les trafics en direction de la Bande de Gaza et de quelques combats entre des combattants bédouins avec des postes frontières israéliens. Ils font passer en Territoire Palestinien tous les produits nécessaires au quotidien mais également des armes et parfois des hommes. Les bédouins se font également « passeurs » dans les années 2000. Des milliers d’immigrés érythréens passent par le Sinaï pour tenter de rejoindre Israël avec l’aide des bédouins mais quand, à la fin de la décennie, le flot d’immigrés va se tarir les « passeurs » vont se tourner vers l’enlèvement et le trafic d’organes pour compenser la perte de revenus.

Les années 2000 vont voir l’apparition de groupes terroristes islamiques ciblant les civils

L’environnement sécuritaire se détériore grandement à partir de 2004 quand un nouveau groupe terroriste Tawhid wal-Jihad (Monothéisme et Jihad) fait son apparition dans le Sinaï avec un double attentat suicide à Taba qui tua 32 personnes, principalement des touristes israéliens et russes. L’année suivante 88 personnes perdirent la vie dans l’explosion d’un bus à Charm el-Cheikh. L’intérêt trop prononcé de ce groupe à choisir ses cibles dans l’industrie touristique amena le gouvernement de Moubarak à réprimer très violemment ces attaques pour protéger les revenus du tourisme et à partir de 2006 le groupe disparut. Toutefois ceux qui restèrent en vie et en liberté furent le vivier de nouveaux groupes terroristes qui allaient devenir très virulents à partir de 2011.

La situation devient notamment intenable pour le gouvernement après la destitution de Mohamed Morsi en 2013 et la classification des Frères Musulmans comme organisation terroriste. La répression gouvernementale d’al-Sissi a fait plus de 1500 morts parmi les Frères Musulmans. Les islamistes du Sinaï considèrent le nouveau gouvernement comme illégitime et de nombreuses attaques contre les forces gouvernementales sont attribuées à des membres des Frères Musulmans. En novembre 2014, un groupe terroriste dont le but était alors la lutte contre Israël prête allégeance au tout nouveau « califat islamique » proclamé par l’organisation État Islamique (EI). Leur but devient maintenant l’établissement d’un califat dans la péninsule du Sinaï et son nom se transforme en Wilayat Sinaï, soit « La Province du Sinaï ». Le groupe est considéré comme le puissant des branches de l’EI en dehors de la Syrie et de l’Irak. En janvier 2014, une vidéo de propagande montre le groupe abattre un hélicoptère de l’armée égyptienne. Le groupe mène depuis 2013 une bataille acharnée contre l’armée gouvernementale et les forces de police avec comme en juillet 2015 des batailles rangées de plus de huit heures et des dizaines de morts dans le camp égyptien. Mais également des attentats contre les civils avec notamment l’explosion d’une bombe dans un A321 de la compagnie Metrojet causant la mort de 224 personnes.

Un conflit qui semble insolvable tant il concentre tous les facteurs d’instabilités du Proche-Orient

Le gouvernement égyptien se trouve néanmoins dans l’incapacité de lutter contre les groupes islamiques. Fin janvier 2016 des attaques font 32 morts dans les rangs de l’armée et de la police. Et les mesures très violentes visant à lutter contre l’expansion terroriste effraient certains qui pensent qu’elles pourraient constituer un vivier pour les recrues futures. Ces mesures sont cependant majoritairement approuvées par les égyptiens qui sont fatigués de l’instabilité et du danger dans la région la plus orientale du pays. Le gouvernement égyptien devrait donc tenter d’intégrer les populations bédouines dans la lutte contre les groupes terroristes et de leur permettre d’accéder au fruit de la croissance du sud en vue de diminuer l’intensité de ce front.

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