EuropeRussie et espaces post-soviétiques

Le rouble s’effondre, la Russie au bord du chaos

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Après des mois de dépréciation, le rouble a cette semaine totalement dévissé. Ainsi, alors que sa valeur fluctuait il y a un an entre 30 et 35 roubles pour un dollar, ce taux a avoisiné les 80 roubles cette semaine, avant de s’établir aujourd’hui à environ 60 roubles. Cette perte de valeur d’environ 50% n’est pas sans conséquence pour la Russie de Poutine, et risque de durer…

Le cours du rouble en dollars (source : Boursorama, au 18/12/2014)
Evolution du cours du rouble en dollars en 2014 (au 18/12/2014, source : Boursorama)

C’est la crise la plus grave à laquelle Poutine est confrontée depuis son accession aux hautes sphères du pouvoir russe, il y a environ 15 ans (la dette russe fut mise en défaut et le rouble fortement dévalué en 1998). La monnaie russe, le rouble, est en effet en chute libre. Cette situation est liée à deux facteurs : d’une part, la chute du cours de pétrole (on pourrait parler de contre-choc pétrolier, puisque le prix du baril est tombé en dessous des 60$) dont la Russie dépend énormément pour ses exportations ; d’autre part, les sanctions économiques de l’Occident qui découlent du conflit actuel en Ukraine, où la Russie est accusée de trop interférer. Ainsi, alors que les recettes d’exportations russes diminuent dangereusement, les capitaux étrangers fuient la Russie : la demande en rouble sur les marchés de capitaux se contracte alors fortement, si bien que le taux de change (i.e. la valeur du rouble sur les marchés) chute complètement…

Pour contrer cette évolution du cours du rouble, la Banque de Russie a tout d’abord continué de racheter du rouble sur les marchés, voyant ses réserves de change s’amenuiser à vue d’œil et vendant même ses réserves en or. Elle a surtout annoncé dans la nuit de lundi à mardi la hausse de son taux directeur de 10,5 à 17%, une augmentation impressionnante alors que ce taux n’était que de 5,5% il y a moins d’un an. L’objectif d’une telle mesure est d’attirer à nouveau les capitaux (les placements en Russie devenant davantage rémunérateurs) et donc soutenir le taux de change du rouble. Mais là encore, les résultats furent mitigés et de courte durée, la spéculation à l’encontre du rouble reprenant rapidement sur les marchés. Pour sortir de l’impasse, Moscou pourrait instaurer un contrôle strict des capitaux, une solution radicale qui briserait pour longtemps la confiance des investisseurs étrangers.

« Dans le scénario le plus défavorable, la situation peut durer deux ans »

Conséquence immédiate de cette situation, l’inflation s’est accélérée (et devrait être de 11,5% sur un selon la Banque de Russie), poussant les taux d’intérêts des crédits immobiliers à dépasser les 20% notamment. La bourse russe, elle aussi, s’est effondrée, alors que certains magasins affichent désormais leurs prix en euros ou en dollars. Si les Russes s’empressent de faire leurs achats avant que les prix ne grimpent trop et tentent de changer leurs roubles contre des euros ou des dollars, les effets ne cette crise n’en sont qu’à leurs balbutiements. En effet, les prévisions ne sont guère optimistes pour les Russes : 2015 devrait voir le PIB russe reculer de près de 5% si le prix du baril en restait à ce niveau. Les investissements en Russie pourraient également se contracter de 10% et les revenus des ménages de plus de 6%. Les partenaires commerciaux de la Russie, comme l’Allemagne, pourraient significativement pâtir d’une stagnation de cette situation.

Ce jeudi, Vladimir Poutine, qui a comparé le comportement de l’Occident à celui d’un « empire », a annoncé que la situation actuelle pourrait durer jusqu’à deux ans. Il faut dire que la Russie n’a pas su diversifier son économie et reste encore très dépendante de ses hydrocarbures. Ainsi, l’évolution de la situation dépend à la fois du cours du pétrole (or, l’OPEP a décidé de ne pas réduire sa production la semaine dernière, maintenant le baril à un prix bas) mais aussi des décisions (géo)politiques de la Russie. Or, la clé de cette dernière équation est détenue par ce même Vladimir Poutine, dont les décisions risquent désormais d’impacter directement sa popularité auprès des Russes…

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