Qui sont les chrétiens d’Orient ?
Alors que le sort des chrétiens iraquiens et syriens est devenu d’une précarité insupportable dans un Moyen Orient ravagé par la guerre et que des milliers d’entre eux demandent asile à la France pour échapper aux persécutions de l’Etat Islamique, l’histoire millénaire de ces minorités préislamiques et la diversité incroyable des Eglises orientales nous enseignent à quel point elles contribuent à la richesse culturelle de la région.
Les premiers siècles de notre ère voient le christianisme se développer avec une immense vigueur dans la partie orientale de l’empire romain. C’est Antioche – actuelle Antakya au sud de la Turquie – qui devient très rapidement le centre politique et spirituel du christianisme syrien, tandis qu’Alexandrie en Egypte, déjà métropole culturelle pour les Juifs et les Grecs d’Orient, s’impose au sud et étend son rayonnement jusqu’en Ethiopie. La christianisation de la Mésopotamie – actuel Irak – et de la Perse est rendue plus difficile par le rayonnement culturel et la puissance politique des empires Arsacide – ou Parthe – puis Sassanide qui engagent de vastes persécutions contre les chrétiens. Cependant, le christianisme en langue araméenne s’y propage à partir d’Edesse au cours du IIème siècle de notre ère, et au Vème siècle l’Eglise Nestorienne autocéphale, aujourd’hui connue sous le nom d’Eglise apostolique assyrienne de l’Orient, s’émancipe définitivement du patriarcat d’Antioche.
Mais c’est surtout le concile de Chalcédoine de 451 ap. J.C – et les querelles théologiques qu’il provoque – qui va morceler le Moyen Orient en une multitude d’Eglises et de communautés.
Proclamant que le Christ est à la fois homme et dieu, il condamne le monophysisme ou unitarisme affirmant que le Christ est uniquement divin. Les querelles entre l’Occident chalcédonien et l’Orient monophysite provoquent au VIème siècle la création de l’Eglise syriaque orthodoxe ou jacobite en Syrie puis de l’Eglise copte orthodoxe en Egypte et enfin de l’Eglise apostolique d’Arménie qui se pose aussi comme anti-chalcédonienne. Ces Eglises « des trois conciles » qui comptent aujourd’hui encore des millions de fidèles vont connaître un développement autonome jusqu’à nos jours malgré la conquête arabe du Moyen Orient. Il existe aussi quelques 23 Eglises catholiques orientales – dont les plus importantes en termes de taille sont sans doute l’Eglise maronite du Liban, l’Eglise chaldéenne d’Irak et l’Eglise melkite – qui se sont rattachées à Rome à un moment donné de leur histoire pour des considérations politiques ou théologiques. Elles ont un statut spécial au sein de l’Eglise catholique et conservent une structure en patriarcat.
Les chrétiens d’Orient ne représenteraient plus que 4 à 5% de la population du Proche Orient au début du XXIème siècle, et si les coptes d’Egypte sont encore environ 8 millions – soit environ 10% de la population – il ne reste plus qu’entre quatre cent mille et un million de chrétiens en Irak sur une population totale d’environ 31 millions de personnes. Les récents déplacements de population, massacres et exodes massifs de Chrétiens en Irak et en Syrie mettent un peu plus en péril cette mosaïque religieuse et culturelle qui contribuait à la fois à la richesse et à l’équilibre de la région.