Un F-16 israélien abattu par la Syrie, l’Iran teste Israël
Un drone lancé de Syrie a survolé Israël le samedi 10 février. En réponse l’armée de l’air israélienne (IAF) a lancé un raid de représailles visant à détruire les infrastructures iraniennes et syriennes d’où est parti l’appareil, probablement iranien. La DCA Syrienne a abattu un des huit F-16 de l’État hébreu. Cet accrochage fait craindre une escalade entre Israël d’un côté, et la Syrie, soutenue par l’Iran, de l’autre. Fortement impliquées dans la reconfiguration du théâtre syrien bouleversé par 7 ans de guerre civile, les deux puissances cherchent à faire émerger une nouvelle donne géopolitique favorable à leurs intérêts divergents.
Une provocation iranienne entraînant une réponse de Tsahal
Le survol du drone, non revendiqué par l’Iran, a été perçu par Tsahal comme une violation de son espace aérien à des fins de renseignement et comme une provocation. Durant l’opération de l’IAF visant à détruire le poste de lancement du drone, un des huit F-16 a été abattu à la suite d’un tir de barrage des batteries de défense antiaérienne syriennes, avec sans doute l’accord tacite de Moscou, allié de la Syrie. La frappe israélienne a également eu pour objectif d’avertir l’Iran des conséquences militaires que pourrait avoir son influence en Syrie. Enfin, de manière plus générale, le conflit syrien permet aux Israéliens et aux Iraniens de tester leurs stratégies antagonistes et leurs systèmes de défense.
Les stratégies israéliennes et iraniennes à l’épreuve de la Syrie
La stratégie israélienne consiste à préserver la liberté de mouvement et d’action de Tsahal dans le Sud Liban et au-delà du plateau du Golan, en territoire syrien. Le Plateau du Golan est un élément éminemment stratégique du dispositif militaire israélien. Il permet de « dominer les hauteurs » entourant le flanc nord-est d’Israël pour constituer une zone tampon. Pour cela Tsahal cherche à empêcher, par des raids ou des frappes, le déploiement et le renforcement de troupes iraniennes ou de leurs supplétifs (le Hezbollah et les milices chiites internationales) et à interdire la constitution de bases iraniennes permanentes en Syrie.
Cependant la stratégie israélienne devient de plus en plus périlleuse face au double jeu russe . Bien qu’il existe une coordination officielle et effective entre Jérusalem et Moscou concernant les frappes russes en Syrie, Vladimir Poutine soutient également le régime de Bachar Al Assad depuis 2015 (en fournissant un appui aérien) et l’Iran (en vendant des systèmes de défense antimissile S-300). Moscou a acquis un poids géopolitique important qu’Israël ne peut négliger.
Le survol du drone constitue une nouvelle confirmation de la forte présence et de l’influence grandissante de l’Iran en Syrie. Le pays est devenu un acteur incontournable du conflit. L’objectif de la République islamique est d’avancer ses pions pour créer une ligne de front contre Israël. Sa stratégie sert deux buts : renforcer l’axe Iran-Irak-Syrie-Hezbollah, de manière à soutenir ses proxies, et poser des jalons, afin d’obtenir un débouché sur la Méditerranée orientale. Cela permettrait à l’Iran d’étendre son influence dans une zone d’intérêt stratégique.
Israël craint un encerclement de la partie septentrionale de son territoire
Le raid de l’IAF du samedi 10 février démontre la volonté d’Israël de rester ferme vis-à-vis de ses « lignes rouges ». L’état hébreu cherche à éviter l’encerclement et à ne pas se laisser dicter son agenda diplomatique et militaire quand ses intérêts de sécurité sont en jeu. Ce n’est pas la première fois qu’Israël intervient en Syrie. Tsahal a par le passé déjà frappé des convois ou des dépôts d’armes du Hezbollah, transitant par la Syrie, allié de Téhéran et de la Russie. Par ses raids, Israël démontre aux acteurs impliqués dans le conflit syrien que ses capacités de renseignement, de ciblage et d’action restent intacts. Cette situation ne pourra sans doute pas dégénérer en conflit ouvert entre Israël et l’Iran, qui bénéficie du soutien russe. Toutefois, les risques d’un conflit entre Israël et le Hezbollah dans le Sud Liban pourraient être accrus. Le Hezbollah, du fait de sa participation au conflit syrien, dispose aujourd’hui d’un arsenal comme de capacités d’action renforcés. Cela pourrait inciter Israël à intervenir sur sa frontière nord si sa sécurité était en jeu.