La Chine et les Etats-Unis ratifient l’accord de Paris sur le climat: et après ?
Le samedi 3 septembre dernier, la Chine et les États-Unis se sont exprimés en marge du G20 afin de ratifier l’accord de Paris sur le climat, qui avait clôturé plusieurs jours de négociations lors de la COP21, en décembre dernier. Les deux pays figurent ainsi parmi les toutes premières économies industrialisées à ratifier l’accord. A ce jour, 26 pays ont ratifié l’accord de Paris.
La ratification de l’accord de Paris par les États-Unis et la Chine est intéressante à de multiples égards. En premier lieu, elle atteste de la légitimité du couple sino-étasunien sur les questions de gouvernance climatique mondiale. Une proximité affichée dès 2013 puis consolidée en 2014 avec la signature d’un engagement mutuel de limitation des émission de gaz à effet de serre (GES) des deux pays. En outre, la ratification de l’accord de Paris par les deux plus gros pollueurs de la planète (ils représentent à eux-seuls 38% des émissions mondiales de GES) ne peut être que saluée.
Mais l’agenda politique est également à prendre en compte ici. Pour Barack Obama, figurer parmi les toutes premières nations industrialisées à ratifier l’accord issu de la COP21 est très symbolique à quelques mois seuelement de la fin de son mandat. Après plusieurs années difficiles, le président américain s’offre ainsi le luxe d’un blason redoré à moindre frais, puisque l’accord de Paris n’entrera pas en vigueur* avant la passation de pouvoir en janvier 2017.
Pour Xi Jinping, cette décision intervient en marge du premier sommet du G20 organisé sur le sol chinois; un moyen pour l’Empire du Milieu de consolider une image de bon élève en matière de transition énergétique, une image déjà amorcée par la revendication du plus grand parc de panneaux photovoltaïques au monde alors que la totalité de ses investissements dans les énergies renouvelables avoisinait les 300 milliards de dollars en 2015. Bien que la Chine ait souvent été critiquée par le passé par son manque d’initiatives sur les grandes problématiques internationales, ou son effacement derrière la Russie sur les questions de sécurité et défense, le gouvernement chinois semble ici vouloir faire figure de nouveau leader de la lutte contre le réchauffement climatique.
Néanmoins, il convient également de noter que, contrairement aux autres grandes nations industrialisées qui ont avancé des chiffres précis, la Chine est restée extrêmement vague sur la nature de ses engagements dans le cadre de l’accord de Paris. Les seuls chiffres fournis font état d’une réduction de 60 à 65% de l’intensité carbone de la Chine de 2005 à 2030 et d’un pic d’émissions de CO2 atteint au plus tard en 2030. Or le terme d’intensité carbone** est très difficilement exprimable à l’échelle d’un pays ; il semble donc d’ores et déjà quasiment impossible de mesurer précisément le respect ou non des engagements chinois.
La Chine et les Etats-Unis montrent l’exemple: quid des autres pays ?
Dernier point non négligeable: en 2012, à Doha, la peur des dirigeants face à l’impossibilité de trouver un accord convenable avait conduit à la prorogation du protocole de Kyoto de 8 ans, jusqu’en 2020. Bien moins contraignante que l’accord de Paris pour de nombreux pays, cette prolongation pourrait freiner les démarches de ratification de gros émetteurs de carbone ; le Brésil, l’Inde et la Russie par exemple, qui n’ont ratifié que tardivement le protocole de Kyoto.
Toutefois, cette ratification des deux plus grands pollueurs de la planète donne de bonnes raisons d’espérer; signé en 1997, le protocole de Kyoto n’était entré en vigueur que…8 ans plus tard, notamment à cause de la réticence de grandes nations (les États-Unis n’ont d’ailleurs jamais ratifié le protocole). Cette fois, la prise d’engagements rapide de pays aussi influents que la Chine et les États-Unis montre l’exemple et participera certainement d’une émulation collective, favorable à une entrée en vigueur rapide d’un accord que l’on qualifiait d’historique en décembre dernier.
*Le protocole de Kyoto ayant été prolongé en 2012 pour une durée de huit ans, l’accord de Paris entrera en vigueur, au plus tôt en 2020, 30 jours après la 55ème ratification si, et seulement si, les 55 pays ayant ratifié le traité représentent au moins 55% des émissions mondiales de gaz à effet de serre.
** A l’échelle d’une entreprise, l’intensité carbone mesure le rapport des émissions de CO2 de cette entreprise à la production ou à la capitalisation boursière de cette entreprise.