Rétrospective 2018 : La Chine
L’année 2017 s’est terminée sur une note positive pour la Chine, qui est parvenue à porter sa croissance à 6,9%, en dépit de certaines prévisions pessimistes. L’année 2018 fut plus compliquée en raison de la guerre commerciale sino-américaine. Toutefois, Pékin s’est montré résilient et a continué à développer ses divers projets. Qu’il s’agisse du projet des nouvelles routes de la soie ou du système de notation de la population, le gouvernement chinois a démontré sa capacité à réaliser ses ambitions. Le président Xi Jinping a également renforcé son emprise sur l’Empire du Milieu.
Janvier a débuté par la visite d’Etat du président français en Chine. Il s’agissait d’un évènement de taille. En effet, d’importants contrats commerciaux ont été signés par les deux chefs d’Etats. Emmanuel Macron a clairement exprimé son intention de devenir l’un des partenaires privilégiés de la Chine, soulignant la montée en puissance de cette dernière. En effet, la Chine apparaît aujourd’hui comme un allié incontournable. Inséparable de son pays, le président, Xi Jinping, a considérablement renforcé sa position.
Xi Jinping, le président roi
En mars, à l’occasion de la session plénière de l’Assemblée populaire, le président chinois est parvenu à faire lever tous les obstacles à son maintien au pouvoir au-delà de 2022. Il s’octroie ainsi la possibilité d’un mandat illimité. Consécration ultime et très symbolique : la « pensée » de Xi Jinping a été inscrite dans la Constitution, au côté de celle du père fondateur de la Chine, Mao Zedong. Une semaine après la modification du texte suprême, Xi Jinping a été réélu à l’unanimité à la tête du pays. Il était le seul candidat en lice.
La toute-puissance du président semble définitivement actée. Beaucoup s’inquiètent d’une dérive autocratique du pouvoir, dans un pays où l’opposition est muselée. Xi Jinping fait également l’objet d’un culte de la personnalité qui semble se renforcer avec le temps. Elément significatif de ce phénomène, le documentaire Trop fort, mon pays, une œuvre de propagande patriotique à la gloire du président, a été le film le plus regardé dans sa catégorie cette année. Toutefois, Xi Jinping a dû relever, en 2018, l’un des plus gros défis de son mandat : la guerre commerciale lancée par les Etats-Unis.
Tensions avec les Etats-Unis
Accusant la Chine de pratiques commerciales iniques, Donald Trump a décidé d’augmenter les taxes douanières sur certains produits importés. Tout au long de cette crise, le président chinois a joué la prudence et a préféré le dialogue à l’escalade, tout en restant ferme. Xi Jinping s’est montré pragmatique face aux annonces erratiques du président américain, en répliquant aux attaques mais également en promouvant l’apaisement, quand cela était possible. Cette fin d’année 2018 a marqué une accalmie dans le conflit sino-américain, dont la suite demeure incertaine. Cette crise n’a pas eu que des conséquences négatives. Elle a permis à la Chine et à la Russie de renforcer leurs relations. Toutes deux en proie à des difficultés avec les puissances occidentales, elles opèrent un rapprochement stratégique. Symbole de cette alliance, une démonstration militaire conjointe a eu lieu en septembre, en territoire russe. Le protectionnisme de Donald Trump a également facilité le dégel des relations diplomatiques sino-japonaises. Le Japon et la Chine ont toujours eu des rapports houleux et complexes, cependant, il semble que les deux pays soient sur la voie de la réconciliation. Cette dynamique, très pragmatique, découle en partie de la conjoncture internationale créée par le président américain. En dépit de tous ces changements d’alliances, la Chine a continué à mettre en œuvre les grands projets qu’elle mène depuis des années déjà. C’est le cas en Afrique, où Pékin investit des milliards.
Projets ambitieux et défis
Début septembre, la capitale chinoise a accueilli le sommet Chine-Afrique, une rencontre à la symbolique forte pour les relations sino-africaines. Depuis longtemps déjà, Pékin entretient des rapports privilégiés avec le continent. Xi Jinping entend bien continuer dans cette voie et a annoncé, au cours du sommet, une aide de 60 milliards de dollars aux pays africains. Il a réaffirmé la position chinoise : investir sans s’ingérer, et a répondu aux critiques en annulant les dettes des Etats en difficulté. En effet, certains avaient pointé du doigt la Chine en l’accusant de surendetter l’Afrique, afin de créer de la dépendance. A Djibouti, première base militaire chinoise en Afrique, la situation semble aussi se compliquer. Après les poignées de mains et les grands sourires de l’inauguration, des cafouillages sont apparus lors de l’attribution des contrats. Les entreprises chinoises, certaines de décrocher les marchés, ont vite déchanté et les difficultés se sont accumulés. Si la Chine demeure puissante en Afrique, sa stratégie rencontre parfois des défis auxquels elle devra répondre. L’autre grand projet, celui des Routes de la soie, est de plus en plus la cible de critiques. Avec pour l’objectif d’améliorer sa connectivité mondiale, la Chine prête de l’argent à des dizaines de pays voisins afin qu’ils développent leurs infrastructures. Le problème du surendettement apparaît une nouvelle fois. Les pays partenaires ne sont pas toujours en capacité de réaliser les ambitions délirantes de Pékin et doivent parfois annuler des projets. C’est le cas de la Malaisie qui, perclus de dettes, a renoncé à la construction d’une ligne ferroviaire. La Chine devra adapter sa stratégie sur le long terme afin de rendre ses desseins viables.
Contrôle et répression de la population
Sur le plan intérieur, Pékin conserve et renforce son emprise sur la population. Les contrôles ont été accrus sur le réseau social Weibo et un moteur de recherche Google, spécialement censuré pour la Chine, est en préparation. Du côté de la liberté de la presse, le travail des journalistes étrangers semble se compliquer. Victimes d’intimidations, les correspondants ont de plus en plus de mal à trouver des témoins prêts à parler, de peur de représailles. Dans ce contexte tendu, le gouvernement continue à mettre en place son système high-tech de fichage des citoyens et à traquer les faits de corruption, à l’aide d’une justice expéditive. Cela fait des années que la pression exercée sur la société n’a pas été aussi forte. Dans le même temps, les Ouïgours, une minorité musulmane, subissent une répression croissante de la part du régime. Enfermés dans des camps de « déradicalisation », les Ouïgours sont forcés à abandonner leur religion, afin de s’intégrer au reste de la Chine.
Les ambitions toujours plus grandes de Xi Jinping finiront-elles par se retourner contre lui, ou, au contraire, parviendra-t-il à surmonter les obstacles et à renforcer son pouvoir ?
Sources