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Émergents : le temps de la stabilisation

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Quelle est aujourd’hui la réalité des pays émergents ? Aperçu à travers trois exemples récents.

« Rolezinhos ». Voilà le terme qui en ce moment ponctue régulièrement les médias et réseaux sociaux brésiliens. Désignant des rassemblements de groupes de jeunes dans les centres commerciaux des grandes villes du pays, la classe politique et les analystes se déchirent sur l’interprétation à donner à ce phénomène, pas si nouveau, mais qui prend une signification particulière à la suite du souvenir encore vif des manifestations et émeutes du mois de juin dernier. Si les deux évènements sont à distinguer, ils n’en sont pas moins assimilables de par le problème qu’ils soulèvent, à savoir le besoin toujours plus grand d’infrastructures adaptées à l’exponentielle croissance urbaine des métropoles du pays. Un constat à l’origine de la mobilisation des manifestants estivaux – indignés par les milliards investis pour le mondial et le JO – et dont les rolezinhos seraient eux plutôt une conséquence naturelle. Initialement coupés de toute revendication particulière – cela change avec la répression policière et les récupérations politiques- , les groupes de jeunes se retrouvant dans les centres commerciaux ne sont que le symptôme de métropoles privées de tout lieu de loisirs et divertissements, faute d’investissements nécessaires. Au-delà de la teinte caricaturalement ségrégationniste (riches blancs/noirs pauvres) que les observateurs veulent bien donner ou non au phénomène, il est certain qu’il demeure révélateur des inégalités de développement d’une société de plus en plus étagée socialement…

Même son de cloche sous le ciel stambouliote où les manifestations de la place Taksim et du parc Gezi pointaient du doigt l’appropriation par l’AKP (parti de l’actuel premier ministre) de la politique urbaine, centrée autour de projets colossaux (notamment une immense mosquée en lieu et place de l’actuel centre culturel Atatürk), coûteux et sans réelle influence sur le quotidien des habitants. Là encore la fermeté de la répression a contribué à attiser les tensions. Plus généralement, la problématique turque devient progressivement celle d’un État de plus en plus autoritaire, sous la férule d’un Erdogan adossé au solide réseau national du parti dont il est issu, aux méthodes douteuses comme le souligne le récent scandale de corruption – à propos d’attributions de marchés publics- touchant des proches du gouvernement en place. Un scandale auquel répond Erdogan en mutant les juges et policiers susceptibles d’approfondir les enquêtes et en usant de plus en plus de la force d’action et d’influence des services secrets, dont le patron est de tous les déplacements à l’étranger du premier ministre…

Sur la corruption l’on pourrait aussi longuement écrire à propos de la Chine et du récent scandale dévoilé par l’ICIJ (Comité international de journalistes d’investigations) à propos des « princes rouges » – proches de dirigeants du parti- impliqués dans nombres d’affaires de corruption et transferts de sommes considérables vers des paradis fiscaux.  Sur le temps long, le principal défi chinois semble cependant être celui démographique : l’ensemble des observateurs s’accorde à dire qu’à l’horizon 2050, plus de la moitié de la population chinoise dépassera les 50 ans, soit un niveau comparable au Japon ou à l’Allemagne. Un état de fait qui appellera nécessairement l’élaboration et le financement d’un système de santé et de retraite efficace à grande échelle, autant dire une tâche colossale…

Inégalités, corruption, vieillissement de la population, autoritarisme etc…, autant de défis sociaux et politiques ne constituant pas une liste exhaustive et qui nuancent les « miracles économiques » tant jalousés. D’ores et déjà les BRICS connaissent des rythmes de croissance de moins en mois soutenus (Inde, Brésil…); et pour cause, débute désormais pour eux une phase cruciale : la consolidation et l’approfondissement de leur formidable rattrapage économique.

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