Rétrospective 2017 : où en est le terrorisme en Occident ?
En 2017, l’Occident – en d’autres termes, l’Europe occidentale, le Canada, les États-Unis, l’Océanie – a été de frappé à plusieurs reprises par des attaques terroristes [1]. Il est ainsi possible d’identifier une vingtaine d’attaques terroristes en Occident, d’inspiration islamiste. Ces chiffres sont évidemment à mettre en perspective : le Moyen-Orient, l’Afrique, et l’Asie du sud restent les principales victimes du terrorisme.
Cette année, il y a eu plus d’attentats en Occident, qu’il n’y a en a eu en 2016 (13 attentats djihadistes avérés en Europe en 2017, 9 en 2016). En outre, des pays qui semblaient jusque là épargnés, ont été atteints pour la première fois depuis plusieurs années. C’est notamment le cas du Royaume-Uni qui a été la cible de l’EI à quatre reprises (Westminster, 22 mars ; Manchester, 22 mai ; Londres, 3 juin ; Londres, 15 septembre).
Des attaques de moins grande envergure qu’auparavant, adoptant un mode opératoire semblable.
A plusieurs reprises, les attentats ont en effet été qualifiés d’attaques « véhiculaires ». Dans ce genre de situation, les terroristes ont eu recours à un camion, pour renverser des piétons. Ensuite – si la situation le permet – ils attaquent directement les passants à l’aide de couteaux ou d’armes à feu. C’est, par exemple, ce qui s’est produit à Londres, mais aussi à Barcelone (17 août) et à New York (31 octobre).
Cela fait plusieurs mois que l’EI conseille à ses fidèles d’attaquer leurs ennemis par tous les moyens possibles et imaginables, y compris les plus vétustes. Pour ce qui est des attaques avec un camion, dès novembre 2016 dans le magazine Rumiyah, l’organisation expliquait clairement l’intérêt tactique d’une telle attaque (difficile à anticiper, et donc à contrer ; possibilité de faire beaucoup de victimes). Il était aussi précisé que l’attaquant devait laisser une note dans le véhicule expliquant son geste, et affirmant son appartenance à l’EI, permettant ainsi une revendication rapide des actions des « loups solitaires », ou individus isolés.
La lutte contre le terrorisme s’organise, et fait parfois ses preuves.
Des attaques ont bien eu lieu, mais selon les autorités il est nécessaire de souligner que des réseaux ont été démantelés, et que des projets ont été stoppés à temps. Il n’est pas rare d’entendre parler d’opérations antiterroristes, qui mettent en avant la coopération entre les différents pays européens. Par exemple, le 7 novembre dernier, dix interpellations simultanées ont eu lieu en France et en Suisse. Ainsi, selon le ministre de l’Intérieur, Gérard Collomb, onze attentats ont été déjoués sur le territoire national entre janvier et septembre 2017. De l’autre côté de la Manche, Andrew Parker, directeur du MI5, a affirmé que neuf projets d’attentats ont été empêchés depuis l’hiver dernier. L’un d’eux visait directement Downing Street, et donc le Premier ministre Theresa May.
En outre, l’accent est de plus en plus mis sur de nouvelles méthodes afin de freiner les actions des groupes terroristes. La lutte contre le financement de l’EI est devenue un des priorités de l’Union européenne. Le Parlement européen a publié un rapport en septembre 2017, analysant en profondeur cette thématique[2]. Ce texte souligne la nécessité de la mise en place d’un cadre international, pour lutter contre les donneurs privés, et faciliter le gel des avoirs financiers des personnes, des associations, ou même des entreprises, qui pourraient avoir des lien avec des organisations terroristes. Cela fait déjà plusieurs années que le Trésor américain cherche à « affamer » différents groupes extrémistes. Selon le rapport de l’Office of Foreign Assets Control publié début décembre :
- 145,8 millions de dollars de l’EI seraient gelés aux États-Unis,
- 5,9 millions de dollars reliés à al-Qaïda,
- 6,2 millions de dollars reliés à Hezbollah.
Le cas des « revenants » [3] représente-t-il une nouvelle menace pour les pays occidentaux ?
Les « revenants », c’est-à-dire les combattants étrangers partis grossir les rangs de l’EI, et qui ont finalement décidé de rentrer en Europe, nourrissent beaucoup de fantasmes. Du fait de la perte de territoire de l’EI en Iraq et en Syrie, ils seraient nombreux à chercher à rentrer chez eux par tous les moyens. S’ils y parviennent, ils pourraient tenter de rejoindre des cellules déjà existantes, pour transmettre leur savoir. L’EI continuerait donc à se propager, par le biais de ces soldats étrangers sur le retour. Il faut néanmoins souligner que tous les individus partis rejoindre l’EI, n’ont pas décidé de quitter le Moyen-Orient. Beaucoup de Français sont encore en Iraq ou en Syrie, et certains ont gagné l’Afghanistan – à proximité de l’Ouzbékistan – selon le ministre des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian. En outre, le nombre de retours a baissé depuis janvier 2017. Les autorités françaises n’en auraient enregistré que neuf. La même tendance à été observée en Allemagne et au Royaume-Uni.
Actuellement, la menace semble donc toujours provenir de l’intérieur, c’est-à-dire d’individus radicalisés déjà présents sur le territoire. De plus, l’EI mise sur un terrorisme « low cost » en propageant son idéologie par les réseaux sociaux, et par ses outils de propagande, et en encourageant des individus isolés à commettre des attentats. En 2017, on a déjà parlé à deux reprises de « revendications opportunistes » par rapport à l’EI (pour l’attaque de Las Vegas et celle de la gare Saint-Charles à Marseille, ayant eu lieu le 1er octobre). Selon le journaliste Wassim Nasr, l’EI pourrait revendiquer des attaques correspondant à ses objectifs, qu’il n’aurait pourtant pas organisé ou commandité. Cette tendance pourrait se confirmer si l’organisation continue à s’affaiblir en 2018.
[1] Du fait du contexte international – et national – cet article parlera principalement du terrorisme islamiste. Néanmoins, il est aussi nécessaire de garder en tête les autres formes de terrorisme présents en Occident.
[2] Pour consulter le rapport du Parlement européen : The financing of the ‘Islamic State’ in Iraq and Syria (ISIS)
[3] Appellation popularisée par l’ouvrage de David Thomson, Les Revenants – Ils étaient partis faire le jihad, ils sont de retour en France, publié en 2016. Prix du livre Albert Londres 2017.