Les Emirats Arabes Unis, nouvelle puissance régionale
Au moment de l’indépendance en 1971, les Emirats Arabes Unis étaient une fédération de petits émirats rivaux. Rien n’indiquait que le pays deviendrait autre chose qu’un pays pétrolier instable, craignant ses deux voisins, saoudiens et iranien (avec qui un différend existe sur les îles Abu Moussa et Tunb). Une série de facteur va toutefois amener la fédération à devenir une puissance régionale.
Tout d’abord, la double menace saoudo-iranienne a obligé le pays à se structurer. Le Sheikh Zayed, leader historique du pays, réussit à fédérer les sept Emirats en un seul territoire avec une relative répartition des pouvoirs et des richesses. Accueillant des bases militaires mais aussi des conseillers étrangers, l’appareil de sécurité émirati s’est également structuré. Les services secrets ont empêché tout attentat, tandis que l’armée obtient des résultats concluant au Yémen. Ensuite, la diversification de l’économie, en particulier dans l’émirat de Dubai, permet au pays d’avoir une nouvelle image. Plateforme économique vers l’Asie du Sud émergente et l’Iran sous sanctions internationales, les Emirats deviennent un modèle de développement pour les pays riches en hydrocarbures. Enfin, le déclin de puissances régionales comme l’Egypte ou l’Irak permet aux Emirats de devenir une nouvelle voix, discrète mais bien réelle dans la région. Toutefois, le pays craint l’influence de groupes subversifs comme les Frères Musulmans. Les Emirats du nord sont moins peuplés, moins riches, et la doctrine islamiste pourrait pousser les populations à remettre en cause la fédération sous l’égide d’Abu Dhabi.
Plusieurs exemples permettent d’illustrer cette montée en puissance émiratie. Abu Dhabi a pleinement pris parti à la mise en place du blocus contre le Qatar, par crainte de l’influence des Frères Musulmans. Dans sa lutte contre le groupe islamiste, les Emirats se sont rapprochés de l’Egypte, politiquement et économiquement. C’est notamment le conglomérat émirati Majid Al Futtaim qui finance le Mall of Egypt. Les investissements émiratis visent également le port de Berbera, dans l’Etat autoproclamé du Somaliland, non reconnu par la communauté internationale. Le port qui comporte une base militaire, est financé par Dubai Port World. Les Emirats ont par ailleurs une base militaire à Assab en Erythrée. Des tensions avec la Somalie ont quasiment poussé Abu Dhabi à reconnaître l’indépendance du Somaliland. Ce n’est pas le seul territoire où les Emirats soutiennent des groupes séparatistes : au Yémen, Abu Dhabi soutient les groupes sudistes indépendantistes, pour éviter, entre autre, l’expansion de l’influence des Frères Musulmans. Les Emirats ont également occupé l’île de Socotra, malgré les protestations du gouvernement Hadi, avant de trouver un accord, tout en maintenant une présence militaire locale.
Bien qu’étant un pays peu peuplé, les Emirats prennent aujourd’hui une influence croissante au Moyen-Orient et dans la mer rouge. L’exemple émirati symbolise ainsi l’évolution de la notion de puissance au XXIème siècle.
Bibliographie
CADRO T., Emirats arabes unis, De Boeck Université, 2015
DAZI-HENI F., Monarchies et Sociétés d’Arabie: Le temps des confrontations, Presse de Sciences Po, 2006
MANEK N., U.A.E. Military Base in Breakaway Somaliland to Open by June, Bloomberg, 6 Novembre 2018
How the UAE put Aden under the control of the militias, Middle East Eye, 1 Février 2018