Les maquiladoras : un modèle obsolète et tué par la concurrence étrangère ?
Les maquiladoras désignent couramment les usines situées au Sud de la frontière entre le Mexique et les Etats-Unis et qui bénéficient d’exonérations fiscales à l’importation pour pouvoir assembler de nouveaux produits qui seront exportés ensuite. C’est au cours des années 1960 que les maquiladoras ont vu le jour, suite à la fin du programme Braceros, qui permettait aux Mexicains de participer aux récoltes agricoles de Californie. Mais aujourd’hui, que reste-t-il de ce modèle ?
« Pauvre Mexique, si loin de Dieu, se près des Etats-Unis », dit un jour Porfirio Díaz, dictateur mexicain de la fin du XIX° siècle. Pourtant, à première vue, la présence américaine apparaît plutôt comme une chance pour le Nord du Mexique, puisqu’elle est d’ailleurs en grande partie liée à la création des maquiladoras. Cependant, cela génère une relation de dépendance du Mexique vis-à-vis des Etats-Unis. En effet, si les usines d’exportation mexicaines sont victimes des soubresauts de la conjoncture économique mondiale, elles le sont encore davantage de la santé de l’économie américaine : elles dépendant à 60% des Investissements Directs à l’Etrangers (IDE) américains, mais surtout des consommateurs nord-étasuniens, qui absorbent environ 85% des exportations des maquiladoras. Et ceci est d’autant plus vrai que l’Accord de Libre-Echange Nord-Americain (ALENA) facilite depuis 1994 ces échanges entre le Mexique et les Etats-Unis, augmentant la dépendance des maquiladoras vis-à-vis du géant américain. De plus, à partir de 2001, ce traité a pris pleinement effet pour les maquiladoras, créant des tarifs douaniers pour leurs importations qui en étaient jusque-là affranchies.
En outre, les usines mexicaines souffrent de la concurrence étrangère, notamment chinoise. Ainsi, après vingt ans de présence à Tijuana, au Mexique et face à la ville américaine de San Diego, Sanyo Electric, entreprise spécialisée dans la production de composants pour téléviseurs et réfrigérateurs, a fermé nombre de ses usines mexicaines pour les relocaliser en Chine. Ceci est également vrai pour le textile ou encore l’industrie du jouet. Et d’autres problèmes s’ajoutent aujourd’hui : le prix des matières premières, en forte croissance ces dernières années, fait perdre de la compétitivité aux producteurs mexicains, tout comme les hausses de salaires (bien plus importantes que dans le reste du pays), et la forte volatilité du peso mexicain par rapport au dollar. Des déséquilibres régionaux importants sont apparus au Mexique, et le Nord du pays doit faire face à un réseau de transport au bord de la saturation, et à une lutte acharnée pour l’eau entre agriculteurs, industriels et particuliers, la région étant quasi-désertique.
Mais tout n’est cependant pas noir. Si le système n’est plus aussi attractif aujourd’hui (il avait par exemple été à l’origine de 800 000 emplois dans les années 1990), il n’en demeure pas moins qu’il a permis au Mexique de profiter de certains transferts de technologies et d’une masse d’IDE énorme servant à développer et industrialiser toute la région frontalière avec les Etats-Unis. Le Mexique a ainsi pu développer des industries plus pointues : mais celles-ci sont aujourd’hui de plus en plus concurrencées par les usines asiatiques…