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Histoire et évolution du péronisme en Argentine

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La victoire de Mauricio Macri aux dernières élections présidentielles a signé une sérieux revers pour les partis se revendiquant de l’héritage du péronisme. Retour sur les origines de ce mouvement politique.

Juan Domingo Perón et sa première épouse, Eva
Juan Domingo Perón et sa première épouse, Eva

Le péronisme est un courant politique devenu le centre de gravité de la vie politique de l’Argentine dans la deuxième moitié du XXème siècle. En 1945 des manifestations populaires organisées par la CGT parviennent à faire libérer l’ancien ministre du travail, le général Juan Domingo Perón, emprisonné par le gouvernement militaire en raison de son poids politique croissant. Élu président en 1946, il rassemble les partis de gauche au sein du nouveau parti péroniste, qui deviendra parti justicialiste en 1971. Le 19 septembre 1955, Perón est renversé puis exilé par un coup d’État mais le « mythe » Péron demeure présent dans le souvenir de la classe ouvrière : il revient au pouvoir en 1973 avant de décéder l’année suivante. Sa mort créa un vide de pouvoir : l’inefficacité du gouvernement mené après sa mort part sa deuxième épouse, Isabel, l’augmentation de la violence sociale et de la corruption furent les indicateurs les plus nets des tensions profondes du pays, aboutissant à un nouveau coup d’état militaire en 1976.

Perón créa un populisme moderne, s’adressant au pays grâce à la généralisation des médias de l’époque, particulièrement la radio et les actualités cinématographiques. Ce n’est pas une coïncidence si Eva Perón, sa première épouse, était une célébrité avant de l’épouser : elle devint une véritable figure populaire, participant activement à la vie politique du pays. Perón rassembla la gauche travailliste ou anarcho-syndicaliste, tout en suscitant l’opposition des communistes. Sa doctrine, le « justicialisme » est un attrape-tout idéologique, basé sur la conciliation de classes et l’organisation corporatiste de la société. Il établit ensuite un lien indissoluble entre l’État et la société civile, le parti n’étant pour lui qu’une machine électorale, revendiquant l’intégration de la classe ouvrière à l’espace étatique grâce aux syndicats. Durant son premier mandat il plaça la modernisation et l’industrialisation du pays, ainsi que l’extension de la couverture sociale, au centre de son action gouvernementale. Son discours, marqué par un certain caudillisme, défendait deux notions majeures dans le discours politique argentin : la justice sociale et la souveraineté nationale. À l’international, Perón a été l’un des précurseurs avec Nasser et Nehru du non-alignement et de la « troisième position ».

Après le retour de la démocratie en 1983, le péronisme est redevenu une constante du débat public, de nombreux partis politiques argentins se réclament encore du péronisme. Parmi ceux-ci, conservateurs et les progressistes se disputent l’interprétation authentique du péronisme et de la gouvernance du pays. Le parti justicialiste est difficile à situer sur l‘échiquier politique : alors que Carlos Menem (président de 1989 à 1999) lança un vaste programme de libéralisation, Nestor Kirchner (2003-2007) puis sa femme Cristina (2007-2015) adhérèrent au dirigisme économique et conçurent le mouvement comme un parti social-démocrate voire socialiste. Il s’agit avant tout d’une idéologie personnaliste et populiste, transcendant les clivages traditionnels.

Les troubles politiques et judiciaires du gouvernement de Cristina Kirchner (2007-2015) entraînèrent la défaite du parti justicialiste au profit de Mauricio Macri, libéral. L’état actuel d’affaiblissement du péronisme pourrait annoncer son effacement en tant qu’élément structurant du système politique argentin et une évolution pouvant s’apparenter à celle du gaullisme en France, devenu une référence dans le débat public plus qu’une force politique. À moins qu’une nouvelle recomposition du mouvement ne lui permette de revenir à la Casa Rosada.

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Lucas MAUBERT

Doctorant en Histoire à l'Université de Tarapacá (Chili). Diplômé de l'IEP de Rennes et de l'Université Rennes 2. Rédacteur pour Les Yeux du Monde depuis 2016.

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