Le Bangladesh face aux groupes fondamentalistes islamistes
Le 31 octobre dernier au Bangladesh une personne a été tuée et trois autres ont été blessées parce qu’elles défendaient la liberté de religion dans le pays. Depuis le début de l’année ce sont au moins trois autres personnes qui ont été assassinées pour les mêmes motifs.
Entouré par le territoire indien, le Bangladesh est un pays qui est de plus en plus secoué par des groupes fondamentalistes islamistes. Ces derniers ont réalisé différentes attaques depuis cette année, dont les dernières datant du 31 octobre qui se sont réalisées à deux endroits différents dans la capitale du pays, Dacca. Les victimes avaient un point commun : elles travaillaient toutes dans des maisons d’éditions. De plus elles avaient toutes deux édité un ou plusieurs livres d’Avijit Roy un auteur, blogueur américain d’origine bangladaise. Ce dernier a lui-même été assassiné le 26 février 2015 à Dacca puisqu’il était un défenseur de la liberté de religion et critiquait l’islamisme radical. Il avait également fondé un site regroupant des intellectuels et militants sud-asiatiques prônant les mêmes idées que lui. L’assassinat d’Avijit Roy a été le premier d’une série qui touche des blogueurs athées défendant la laïcité. Pour ces différents assassinats, le mode opératoire est identique : les tueurs utilisent des machettes et des rasoirs et laissent leurs victimes dans un bain de sang. Les derniers assassinats ont été revendiqués sur Twitter par la branche d’Al Quaïda dans le sous-continent indien (Aquis) ce qui tend à poser la question plus générale de l’émergence de groupes fondamentalistes islamistes au Bangladesh.
La montée en puissance des groupes islamistes radicaux
La Bangladesh se compose d’une population à forte majorité musulmane (environ 90% de la population totale). L’islam y est religion d’Etat mais selon la Constitution du pays le gouvernement doit garantir l’égalité des droits et la pleine liberté de culte aux citoyens d’autres confessions religieuses. Depuis 2013 on assiste à une résurgence de l’intégrisme islamique puisque le gouvernement a institué un Tribunal Pénale International (TPI) dans le but de poursuivre et de condamner les auteurs des crimes commis pendant la guerre ayant conduit à l’indépendance du Bangladesh en 1971. Ainsi ont été traduits en justice tous les principaux dirigeants du Jamaat-e-Islami, le parti fondamentaliste islamique, et certains membres du Parti Nationaliste du Bangladesh (le BNP). Malgré le fait que ces individus étaient coupables de crimes de guerre, le Jamaat-e-Islami a dénoncé ces tribunaux comme étant « politisés », comme un instrument de l’Awami (le parti politique au pouvoir) destiné à éliminer ses adversaires politiques, et a lancé la première d’une longue série de grèves en signe de protestation. À chaque nouveau verdict des tribunaux, le parti islamiste a donc lancé des arrêts de travail dans tout le pays qui ont systématiquement dégénéré en violences. Ces grèves ont permis au Jamaat-e-Islami de gagner en popularité au sein du pays. Actuellement, une des plus violentes organisations fondamentalistes est le Hefajat-e-Islam (« protecteurs de l’islam ») qui souhaite une Constitution basée sur la Charia ou la peine de mort pour toutes personnes insultant Allah, Mohamet ou l’islam.
Ainsi le Bangladesh doit faire face à une montée en puissance des groupes fondamentalistes islamistes. Ces derniers redoutent que les idées des libres penseurs, comme ceux ayant été assassinés, gagnent du terrain au sein de la société bangladaise. C’est pourquoi en 2013 une liste de 84 intellectuels « à éliminer » avait été publiée par des groupes islamistes radicaux. De fait, les blogueurs bangladais critiquant l’islamisme radical utilisent dorénavant des pseudonymes.