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Japon : Yuriko Koike défie Shinzo Abe

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Souhaitant profiter d’un regain de popularité, et de la faiblesse de l’opposition, le Premier ministre japonais Shinzo Abe (Parti libéral démocrate, PLD) a annoncé la tenue d’élections législatives anticipées. Dans un sondage publié par le journal Nikkei, 44% des électeurs affirmaient vouloir voter pour le PLD. La partie semblait gagner d’avance pour S. Abe. Néanmoins, une candidature surprise pourrait perturber ses plans.

Suite à la déclaration du Premier ministre, la gouverneure de Tokyo, Yuriko Koike a annoncé la formation d’un nouveau parti politique (Parti de l’Espoir) et sa candidature.

Yuriko Koike a décidé de défier une nouvelle fois Shinzo Abe, et le PLD.

Personne ne s’attendait à ce que Y. Koike se lance dans la course. Les Japonais connaissent, bien sûr, son ambition. Pour illustrer ce trait de caractère, les journalistes font souvent référence à son chien baptisé So – diminutif de « Sori », mot japonais pour « Premier ministre ». De plus, elle a gravi tous les échelons, de député à ministre de l’Environnement (2003-2006) et ministre de la Défense (23 jours en 2007).

Elle est principalement connue pour être la première femme à gouverner la capitale depuis l’été dernier. A cette occasion, elle a rompu avec le PLD – et donc S. Abe – en se présentant sous l’étiquette « indépendante ».  Sa déclaration de mardi a donc transformé ce qui s’annonçait comme un « référendum » sur l’action de S. Abe, en un duel entre deux figures majeures de la politique japonaise.

En tant qu’ancienne membre du PLD, Y. Koike partage certaines idées de S. Abe, notamment sa vision ultra-nationaliste. Par contre, contrairement à lui, elle défend la possibilité d’une sortie du nucléaire. Par dessus tout, elle affirme vouloir en « finir avec la politique de vieille école », et profiter de ces élections pour « changer » le Japon. En somme, elle se présente comme la candidate « anti-establishment », alors qu’elle a déjà une solide carrière politique derrière elle. C’est en jouant cette carte qu’elle est devenue gouverneure de Tokyo. Reste à savoir si une campagne similaire fonctionnera à l’échelle nationale.

Est-ce que son parti a réellement une chance de l’emporter le 22 octobre prochain ?

Sa principale faiblesse est que de nombreux Tokyoïtes sont déçus par cet engagement soudain. Elle avait en effet promis qu’elle se consacrerait uniquement à la ville de Tokyo, et à la préparation des Jeux Olympiques d’été de 2020. De plus, à un mois du scrutin, il n’est pas certain que les Japonais décident de miser sur un nouveau parti. Elle y est bien sûr arrivée à Tokyo – en créant un parti local Tomin First pour les élections locales – mais convaincre la majorité des électeurs du pays est une autre histoire. Enfin, à cause de la menace que représente la Corée du Nord, et de l’incertitude liée à la présidence Trump, les électeurs pourraient favoriser la continuité, et un Premier ministre dont la politique économique a été qualifiée de « succès » par le FMI.

Néanmoins, depuis son annonce, il y a un véritable engouement médiatique autour de sa candidature, et de sa personne. Son profil – une femme de 65 ans, diplômée de l’université du Caire,  ancienne présentatrice télé – détonne dans la classe politique nippone. Cet engouement a été renforcé par la démission de différents députés, décidés à s’engager à ses côtés dans le Parti de l’Espoir. De plus, les électeurs japonais sont fatigués par les élections à répétition. Celles du 22 octobre seront les troisièmes depuis le retour de S. Abe au pouvoir en décembre 2012.

La décision de Y. Koike est donc un pari risqué. Il sera difficile pour elle de devancer largement S. Abe en quelques semaines. Beaucoup d’observateurs affirment que ce n’est pas une mission impossible, et qu’elle le mettra en difficulté. Elle ose même se comparer à Emmanuel Macron, qui, à la tête d’un nouveau parti, est parvenu à devenir Président de la République française. Néanmoins, il a eu une année pour convaincre, et pas seulement un mois.

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