Rétrospective 2013 : l’Iran en 2013, année d’un nouveau départ pour le dossier nucléaire
2013 aura été une année charnière pour la diplomatie iranienne. Le 24 novembre dernier, après des années d’âpres négociations, un accord sur le programme nucléaire iranien était finalement trouvé entre l’Iran et les pays négociateurs, mettant fin à près de 35 ans d’immobilisme. Revenons donc sur les étapes d’un processus qui n’avait rien d’évident.
C’est d’abord avec les négociations Almaty 1 en février puis Almaty 2 en avril que le processus s’enclenche. Les tentatives, en particulier européennes, pour mettre un terme au programme d’enrichissement iranien se heurtent bien vite à la véhémence de M. Ahmadinejad et aucun accord n’est trouvé. Un nouvel espoir de compromis naît le 14 juin 2013 lorsque Hassan Rohani accède à la présidence de la République d’Iran, élu dès le premier tour. Hassan Rohani se veut réformateur et les occidentaux se souviennent de 2003, lorsque M. Rohani avait décidé l’interruption provisoire du programme d’enrichissement nucléaire iranien.
Néanmoins, les choses bougent lentement. Hassan Rohani se dit en faveur d’une reprise des négociations avec l’Occident mais le Guide Suprême Ali Khamenei (dont la légitimité avait été mise en doute sous la présidence de M. Ahmaninejad) se retrouve en 2013 au premier plan de la question du nucléaire et tient un discours nettement moins engageant.
C’est finalement le 24 novembre qu’un accord entre les deux parties sera trouvé, au terme de cinq jours de négociations houleuses à Genève. Celui-ci pourrait être applicable à compter du 20 janvier, et pour une durée de six mois. L’accord prévoit un allègement des sanctions imposées à l’Iran correspondant à 7 milliards de dollars environ en l’échange de l’application de mesures visant d’une part à restreindre le programme nucléaire iranien et d’autre part à le rendre beaucoup plus transparent aux yeux de l’Agence Internationale de l’Énergie Atomique.
Quelles perspectives cet accord intérimaire ouvre-t-il ? Que peut-on attendre en 2014 ?
La victoire évoquée par le camp occidental après la signature de cet accord de Genève doit être nuancée. Certes, ce compromis a une valeur historique, tant les négociations entre les deux camps étaient gelées depuis des années. Une brèche a été percée dans le mur blindé qui séparait jusqu’alors Washington de Téhéran. Mais le doute s’installe de part et d’autre, et nul ne sait encore si cet accord sera le déclic tant attendu.
D’abord, diverses interprétations de cet accord ont pu être évoquées des deux côtés. Du côté des occidentaux, et en particulier des français, l’accord du 24 novembre signifie l’arrêt total du programme iranien d’enrichissement nucléaire. A l’inverse, M. Rohani s’est empressé d’annoncer après la signature de l’accord, que l’Iran continuerait de plein droit son programme d’enrichissement.
Rappelons également que les deux camps s’opposent sur la question depuis plus de trente ans et la crise ne se pourra se résoudre d’un simple accord de principe. Un compromis similaire avait été trouvé en 2003 lorsque les iraniens avaient accepté d’interrompre temporairement leur programme nucléaire. Un compromis qui s’était avéré être un échec et qui avait conduit le très conservateur Mahmoud Ahmanidejad au pouvoir.
En réalité, le mur est percé mais aucun des deux camps ne semble pour l’heure vouloir se risquer à le franchir. Depuis le 24 novembre, aucun nouveau dialogue ne s’est ouvert sur la question, comme si l’on ne voulait surtout pas mettre en péril le fragile écrin d’une entente qui a mis des années à se constituer. Le gouvernement de M. Rohani est en sursis. Le Guide Suprême a concédé bien malgré lui un rapprochement de l’Occident, à l’heure où l’économie iranienne est au plus mal (15,3% de chômage en 2011, un taux d’inflation qui frise les 25%…), mais il veut des résultats rapides. Les conservateurs regroupés derrière Ali Khamenei redoutent en effet cette ouverture, ils craignent l’arrivée du Grand Satan (les Etats-Unis) sur leur territoire qui pourrait nuire à la stabilité de la république islamique.
Rassurer d’une part les conservateurs réticents à l’ouverture, et attirer d’autre part les investisseurs étrangers pour relancer la croissance d’un pays au bord de l’asphyxie, tels seront les défis majeurs du président Rohani en 2014. Nul doute en tout cas que l’Iran montrera patte blanche au cours des six mois de validité de l’accord de Genève. Reste à savoir ce qu’a décidé M. Rohani quant à « l’après Genève ».