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Les Fatimides chiites s’opposent à Bagdad

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La valse des empires musulmans (4/8). La dynastie fatimide (910-1171) naît en Ifriqiya, au Maghreb oriental. Ce califat chiite ismaélien refuse le modèle abbasside de Bagdad et souhaite le renverser.

Les Fatimides, des chiites opposés à Bagdad.
Évolution des conquête de l’Empire fatimide (wikimedia).

Installation au nord de la Tunisie

C’est ainsi qu’à Raqqada, en 910, dans l’actuelle Tunisie, un certain Ubayd Allah, après avoir fui la Syrie quelques années plus tôt, est proclamé calife. Dix ans plus tard, Mahdi Ubayd Allah quitte Raqqada pour aller installer sa nouvelle capitale à Mahdia, à 200 km au sud de Tunis. Il contrôle et pacifie en quelques années le territoire hérité des Aghlabides, c’est à dire le nord de la Tunisie, le nord-est de l’Algérie ainsi que la Sicile.

Al-Mahdi voit les choses en grand. Il lance des raids dans le sud de l’Italie contre l’Empire byzantin ainsi qu’en Égypte contre l’Empire abbasside, mais sans succès. Il pose néanmoins des bases solides pour ce qui est en train de devenir l’Empire fatimide. Al-Mahdi a un objectif principal, qui sera aussi celui de ses successeurs : renverser et supplanter le califat abbasside.

Après sa mort en 934, ses héritiers poursuivent le développement de l’empire qui devient rapidement riche et puissant. Cependant, entre les sunnites et kharidjites de la région, le calife omeyyade de Cordoue ou encore les Byzantins, les ennemis sont nombreux. L’empire risque même de s’effondrer quand Mahdia, la capitale, est assiégée en 945 par des tribus kharidjites.

Le Caire, nouvelle capitale

Quelques années plus tard, en 969, le quatrième calife fatimide, Al-Muizz, décide de se lancer à la conquête de l’Égypte. La nouvelle capitale, Le Caire est fondée la même année et devient rapidement le cœur ismaélien du Proche-Orient. L’empire se dote de relais culturels et universitaires comme l’université Al-Azhar, haut lieu de l’enseignement ismaélien. Si les Fatimides n’ont jamais cessé de chercher à convertir de nouveaux croyants au chiisme ismaélien, ils n’ont jamais non plus forcé quiconque à se convertir.

Très rapidement après la prise de l’Égypte aux Abbassides, les Fatimides descendent au sud et soumettent les deux villes saintes, Médine et La Mecque. Ils s’emparent également de la Palestine et de l’ouest de la Syrie, bien qu’ils ne réussirent jamais à contrôler ces territoires entièrement. L’apogée de l’empire peut être située sous le règne du calife Al-Aziz (975-996). Ce dernier diffuse largement la culture ismaélienne jusqu’à Damas et fait du Caire un carrefour commercial de première place dans le monde musulman.

Montée en puissance des vizirs

Le déclin s’amorce au XIe siècle. Confronté à la montée en puissance des turcs seldjoukides à l’est, à une perte d’influence à l’ouest, l’empire se replie petit à petit sur Le Caire. La scène politique intérieure ne fait qu’aggraver les choses. La guerre interne entre différentes factions de l’armée ainsi que la famine qui touche l’Égypte conduit à une militarisation du régime. Désormais, le véritable pouvoir est entre les mains des vizirs, les califes n’ayant plus qu’une fonction essentiellement symbolique.

Saladin remplace les Fatimides

Si les Fatimides parviennent à repousser les ambitieux Seldjoukides, la lutte pour le pouvoir au Caire fait des ravages. Au XIIe siècle, Nur-al Din, un Turc sunnite maître d’une partie de l’Anatolie est appelé en soutien par des factions militaires fatimides en Egypte. Après sa victoire en 1169, il nomme son lieutenant Saladin, un kurde, vizir de l’empire. Ce dernier prend le pouvoir après avoir crée sa propre dynastie autonome, les Ayyubides. Il replace très rapidement l’empire sous influence abbasside en prêtant allégeance au calife de Bagdad. C’est donc la fin officielle du chiisme ismaélien et le retour du sunnisme en Égypte. Malgré cela, l’influence culturelle et religieuse laissée par les Fatimides dans le monde musulman est conséquente et continue pendant des siècles d’influencer culturellement et politiquement l’ensemble de la région.

Ressources :

Jadla Ibrahim. « Les Fatimides et les Kutāma : une alliance stratégique ou un mal nécessaire? » In: Mélanges de l’École française de Rome. Moyen-Age. 2003.

Dossiers d’archéologies, « Le Caire à l’époque fatimide », n°223, 1998.

Le Monde, « L’Histoire du Proche-Orient », hors-série, 2018.

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Pablo MENGUY

Ancien étudiant en école de journalisme, aujourd'hui en master à l'Institut français de Géopolitique (IFG).

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